Soja : Retour en force des punaises

A. Micheneau – Terres Inovia

La punaise représente un des principaux ravageurs du soja. Pourtant, lors de ces dernières campagnes, les arrivées souvent tardives, l’avait rendue peu impactante. La campagne 2023 nous rappelle que la menace est toujours présente, et qu’une surveillance précoce s’impose. Son retour en force dans les parcelles, laisse penser que son pouvoir de nuisibilité a pu être sous-estimée, et sa présence parfois négligée.  Quel impact réel de ce ravageur sur la culture, et quels leviers d’action ? Focus sur les références existantes.

Punaise verte, un ravageur de fin de cycle à surveiller dès la floraison

La punaise verte Nezara viridula est un insecte piqueur-suceur injectant dans les tissus végétaux des enzymes pour extraire le jus nutritif. Le ravageur s’attaque à tous les organes de la plante mais plus particulièrement aux gousses et aux graines en formation. Parmi les 5 stades larvaires, ce sont les larves les plus développées qui réalisent les dégâts les plus dommageables en particulier le stade L4 (photo ci-contre), ainsi que l’adulte. 

D’habitude, les adultes arrivent sur les parcelles aux alentours de la mi-juillet, autour du stade R3, marqué par l’apparition des premières gousses, mais le niveau des populations préjudiciables est atteint dès le mois de juin sur certaines parcelles.

En effet, à cette période seuls les adultes sont présents, ou éventuellement les tout premiers stades larvaires, qui ne sont alors pas nuisibles pour la culture. Par conséquent, la présence de punaises verte n’impacte pas la mise en place du nombre de gousses, ni même du nombre de grains.

En revanche, au début du stade R7 (chute des feuilles et premières gousses mûres), on constate que les populations de larves, atteignent les stades les plus préjudiciables, stades L4 et L5, en plus des adultes qui sont toujours présents. Sur le soja, l’impact se situe donc exclusivement au niveau pondéral, c’est-à-dire au niveau du remplissage et non au niveau des avortements. Selon les conditions, l’évolution larvaire peut être plus précoce et survenir dès le stade R6 du soja. C’est ce qui s’est produit en 2023, avec des infestations de larves L4 inhabituelles avant la mi-août, du fait notamment des arrivées précoces des adultes. 

Les impacts sur la culture

Les dégâts peuvent s’observer sur différents critères : rendement, composition de la graine (altération du contenu lipidique, et composition en acide oléique), pouvoir germinatif, qualité visuelle, etc. Sur la dernière campagne, on note une forte dégradation de la qualité visuelle, entrainant des déclassements de graines initialement dédiées à l’alimentation humaine, vers l’alimentation animale , ainsi qu’un impact sur le rendement. 

Il apparait que le rendement décroit à partir de 1 à 2 individus par mètre linéaire. La perte peut atteindre 10% du potentiel soit une perte de 2 à 4 q/ha, pour une pression de 3 à 4 insectes par mètre linéaire, en effectif constant de la mi-août (R6 à 20 jours avant la récolte). Cette valeur peut être retenue comme seuil économique, tenant compte de l’écrasement lors du traitement. Dans certains cas, des pertes de 20% en potentiel ont été enregistrées avec des effectifs de 15 à 21 punaises par mètre linéaire sur la même période.

Par conséquent afin d’éviter d’atteindre 3 à 4 insectes au stade R6, une surveillance doit s’engager dès le mois de juillet. Si l’on repère régulièrement (dans plus d’une zone sur 2) la présence de quelques punaises (adultes ou larves) alors, il est préconisé d’intervenir. A partir du stade R6, le seuil 3-4 insectes par mètre linéaire peut être retenu.

Par ailleurs, ces travaux se sont également intéressés à l’impact des attaques de punaises sur la faculté germinative des graines. Tandis que ce taux est compris entre 94% et 88% pour les graines saines ou sans trace évidente d’attaque, il tombe à 19% pour les graines présentant des symptômes de flétrissement et une taille réduite (Cf. à partir du lot 3 sur la photo).

Identifier et évaluer le risque avant la pullulation des larves

Une seule substance active, la Lambda cyhalothrine est utilisable (liste non exhaustive : Karaté Zéon, Lambdastar, Estamina à 0.075,) pour lutter contre la punaise. Les pullulations pouvant être tardives, il est important de tenir du délai avant récolte (DAR) de 35 jours. Les interventions, lorsqu’elles se justifient, sont donc généralement à positionner sur la deuxième quinzaine d’août. 

Le niveau d’efficacité de la Lambda cyhalothrine est satisfaisant, il est évalué à 80% , 3 jours après le traitement (résultats de 1994) sur une pression de punaises élevée. Des références anciennes à reconfirmer, mais peu susceptibles d’avoir évoluées. Des échecs ont pourtant été constatés cette année. 

Plusieurs explications peuvent être avancées. En premier lieu, des interventions trop tardives, sur des populations trop nombreuses, avec comme conséquence une efficacité visuelle moins visible. Les conditions météorologiques sur les périodes d’application, ont pu favoriser la dégradation de la molécule, diminuant donc sa persistance, et pouvant faciliter la reconstitution des populations. Par conséquent, dans le contexte de l’année 2023, plus que jamais, la surveillance était indispensable et cela dès le mois de juin, afin d’être en capacité de déclencher une intervention suffisamment précoce, avec dans certains cas, la nécessité d’une seconde intervention.

Votre Contact régional 

Quentin Lambert – q.lambert@terresinovia.fr

Auteur de l’article : Rédaction Tup 31