Quentin Lambert – Terres Inovia
En 2022 les conditions météorologiques à l’implantation du tournesol et au printemps ont été, dans le Sud-Ouest peu propices aux contaminations. De ce fait, le mildiou a été globalement bien moins présent qu’en 2021 ; excepté dans certains secteurs dans le Tarn et l’Aude dans le cas de semis précoce,
où la présence de la maladie est légèrement supérieure à celle de l’ensemble du territoire du Sud-Ouest. Terres Inovia rappelle toutefois qui faut rester vigilant et mettre tous les atouts de son côté pour lutter contre cette maladie. Cet article fait le point sur les solutions existantes et les préconisations pour la prochaine campagne.
Des mesures agronomiques très efficaces sont à associer à un raisonnement pour le long terme portant à la fois sur le choix variétal et l’utilisation ou non d’un traitement de semences anti-mildiou
Si les attaques de mildiou impactent généralement peu le potentiel de production, certains cas bien plus graves peuvent se manifester à l’occasion de conditions favorables (rotation, choix variétal, pluviométrie). Dans le Sud-Ouest, les années 2019 et 2020 ont pu marquer les mémoires.
Ce qu’il faut savoir :
- Cet agent pathogène est capable de se conserver 10 ans dans le sol. Toute attaque, même minime, contribue donc à alimenter le réservoir d’inoculum de la maladie pour longtemps ;
- Des cas de contournements de la résistance de variétés RM9 sont observés depuis 2019, principalement dans le Sud-Ouest en situations de rotation courte ; ces attaques, souvent graves, signent une nouvelle évolution du mildiou ;
La surveillance du territoire national a mis en évidence une pression mildiou en augmentation depuis 4 ans : entre 12 et 19% de parcelles touchées, avec une augmentation significative de la proportion des attaques graves à plus de 10% de pieds nanifiés.
Mesures agronomiques en premier lieu pour stratégie de lutte sur le long terme.
La protection doit d’abord être basée sur :
- Des rotations longues où le tournesol ne revient, à minima, pas plus d’une fois tous les 3 ans, et
De bonnes pratiques agronomiques permettant de réduire le réservoir d’inoculum dans les parcelles (bonne gestion des repousses et des adventices telles que le xanthium, l’ambroisie et autres composées) et de limiter les infections (éviter une levée sous de fortes pluies) : pas d’abats d’eau, pas de mildiou !
Choix variétal et l’utilisation ou non d’un traitement de semences anti-mildiou : jouer l’alternance
Le raisonnement du choix variétal et l’utilisation ou non d’un traitement de semence doit être tenu à la parcelle, car il dépend de l’historique de chacune :
- La parcelle a-t-elle subi des attaques de mildiou sur les 5 dernières campagnes ?
- Quelles variétés (génétique, profil RM) y ont été cultivées ?
- Avec quel(s) traitement(s) de semences anti-mildiou ?
Il s’agit donc de combiner au mieux les moyens de lutte contre le mildiou du tournesol pour gérer la situation en fonction de l’historique des parcelles. Tenu sur le temps long, le raisonnement conjoint autour de ces 3 éléments « situation x variété x traitement de semences » a pour objectif de préserver à la fois l’efficacité des résistances des variétés et l’efficacité des solutions chimiques. Une nécessité : l’alternance au fil des campagnes ! Alterner les variétés permet de maximiser les chances de changer, au fil des campagnes, les gènes de résistance auxquels on expose le mildiou dans la parcelle et donc de réduire les risques de contournements. Il existe également une liste positive de variétés (noté RM8# ou RM9#) testées et résistantes à la principale race qui contourne les résistance RM9 « simple ». Cette liste est disponible sur le site internet de Terres Inovia.fr.
Traitement de semences contre le mildiou : deux nouvelles solutions
Pour les semis 2023, deux nouvelles spécialités à base d’oxathiapiproline (LUMINSENA et PLENARIS) sont autorisées, ainsi qu’un stimulateur de défenses des plantes dont l’efficacité contre le mildiou a été démontrée, le RESSIVI. Si ce dernier peut être utilisé comme seul anti-mildiou en traitement de semences, LUMISENA et PLENARIS doivent impérativement être utilisés en association avec le RESSIVI, pour préserver dès à présent leur efficacité. Aujourd’hui la seule spécialité commerciale autre que LUMISENA/PLENARIS efficace contre le mildiou disponible est le RESSIVI (acibenzolar-S-méthyl).
Pendant longtemps, le métalaxyl-M (APRON XL) fut le seul traitement de semences utilisé dans la lutte contre le mildiou. Depuis, et dans certaines situations les premières souches de mildiou résistantes au métalaxyl-M sont apparues. Depuis, l’APRON XL présente une efficacité partielle et irrégulière cependant profitable et exploitée. En raison du contournement de la résistance de certaines variétés RM9, il était nécessaire de disposer d’un nouveau traitement de semences.
Du bon usage des traitements de semences contre le mildiou
La durabilité de la lutte contre le mildiou est un enjeu de taille : éviter les contournements de la résistance variétale et éviter la résistance aux fongicides.
En situation à faible risque, la lutte génétique peut suffire (rotations longues). Elle est l’occasion de faire l’impasse sur le traitement de semences. Le risque est encore plus faible avec les races de mildiou plus anciennes.
En situation à risque, les races de mildiou sont beaucoup plus récentes, notamment la race 714 qui contourne certaines variétés RM9. Pour ce type de génétique, le traitement de semences est fortement conseillé. Mais, le risque est aussi de voir apparaître (sélection puis multiplication d’individus) une résistance au traitement de semences. C’est la raison pour laquelle, aujourd’hui Terres Inovia conseille d’associer systématiquement LUMISENA/PLENARIS à RESSIVI.
Aujourd’hui la seule spécialité commerciale autre que LUMISENA/PLENARIS efficace contre le mildiou disponible est le RESSIVI (acibenzolar-S-méthyl). Tout autre mélange proposé est à donc proscrire.
Choix variétal et traitement de semences : règle de décision proposée par Terres Inovia pour 2023 (schéma ci-dessous)
Et la fonte de semis ?
Comme l’APRON XL, les nouveaux produits qui sont aussi des spécifiques anti-pythiacées, ne sont pas efficaces contre la fonte de semis (phoma, fusarium, botrytis, etc.…). A l’exception de l’agriculture biologique, le traitement à base de fludioxonil (CELEST/INFLUX) reste systématique dans toutes les situations.