Publié le 2 juin 2020
En culture conventionnelle, près de 30% des parcelles de tournesol et 18 % pour le soja ont été binées en 2019 dans le Sud-Ouest. Issus des enquêtes « pratiques culturales 2019 » Terres Inovia, ces chiffres – semblables à ceux des enquêtes précédentes – montrent une bonne appropriation de la technique par les agriculteurs qui la pratiquent, même si elle pourrait s’étendre davantage dans les parcelles à large écartement. Nous faisons le point sur cette technique qui allie simplicité de mise en œuvre, économie et efficacité.
De nombreux atouts à mettre en lumière
Le binage est tout d’abord un composant efficace du programme de désherbage des oléagineux de printemps, qu’il soit « tout mécanique » ou mixte. Dans ce dernier cas, il permettra une réduction d’usage d’herbicide sous réserve que la pression en mauvaises herbes soit faible à moyenne. En agissant sur des adventices plus développées que celles que peuvent arracher la herse étrille ou la houe rotative, la bineuse permet, par ailleurs, d’intervenir plus tardivement en cours de végétation et offre ainsi une plus grande souplesse d’organisation.
Sur adventices difficiles (chardon, datura, xanthium, bidens…), le binage en conditions sèches apporte un bon complément pour diversifier la lutte contre ces espèces et mettre toutes les chances de son côté, mais aussi en rattrapage quand les programmes herbicides ont été mis en défaut .
Par son mode d’action qui sectionne et recouvre les adventices, et bien qu’elle n’intervienne pas sur le rang (sauf si doigts rotatifs), la bineuse a une certaine action sur vivaces en ralentissant leur croissance, ce qui n’est pas le cas avec une herse étrille ou une écrouteuse.
On soulignera en dernier lieu, que le binage est envisageable sur tous types de sol même s’il reste à éviter dans des situations de sol peu nivelé avec des courbes et dévers ou une présence importante de résidus ou de cailloux.
On notera par ailleurs une influence positive du binage sur l’alimentation en eau de la plante, par l’effet combiné d’une baisse de l’évaporation du sol et d’une meilleure infiltration de l’eau de pluie ou d’irrigation après passage.
Zoom sur les conditions de réussite du binage
Réunir les bonnes conditions à la parcelle
Quelle que soit la culture (tournesol ou soja), il faut en amont soigner la préparation du sol. Bien entendu, prévoir un grand écartement (au moins 40 cm) et exclure les parcelles à gros cailloux. Au moment du passage de la bineuse, le sol doit être ressuyé. Pour éviter tout phénomène de repiquage des plantules, il faut s’assurer que la météo prévoit des conditions séchantes pour les jours suivants.
S’assurer d’intervenir au bon stade des adventices
Bien que la plage d’intervention du binage soit plus large que celle d’autres outils de désherbage mécanique, le stade des adventices reste une clé de réussite. Pour une efficacité optimale, les adventices doivent être jeunes : jusqu’à 3-4 feuilles pour les dicotylédones et avant tallage pour les graminées.
Régler le matériel avec soin et tester préalablement l’outil : les réglages avant tout !
Les réglages sont essentiels pour préserver la culture tout en détruisant un maximum de mauvaises herbes. Il est conseillé de tester préalablement l’outil sur une distance courte mais suffisante pour que la vitesse de travail soit atteinte. Attention, ces réglages doivent être renouvelés à chaque stade de développement de la culture et des adventices, et à chaque nouvelle parcelle (surtout si les types de sol diffèrent).
Avant tout, s’assurer que l’outil conserve bien la trajectoire du tracteur. Ajuster ensuite la profondeur des éléments et l’angle d’attaque des dents en fonction du type de sol et des éventuelles zones de compactions derrière les roues du tracteur. Le troisième point sert à mettre les éléments d’aplomb par rapport au sol et trouve tout son intérêt dans les sols compactés.
Pour protéger les jeunes plants de soja ou de tournesol contre les projections de sol, des disques ou roues crénelées protège-plants peuvent être montés sur la bineuse. Pour travailler au plus près du rang, des doigts rotatifs en caoutchouc ou des lames Lelièvre peuvent également être utilisés pour désherber au plus près de la culture, là où une bineuse classique ne peut accéder.
Le type de dent (rigide ou flexible), la largeur et la forme des socs, influencent le travail du sol et la qualité du désherbage. Si les conditions météo le permettent, il est conseillé d’envisager plusieurs binages pour garantir un résultat satisfaisant. Adapter alors la profondeur de travail, le choix des dents et socs au comportement du sol.
À quel moment intervenir avec les outils ?
Le binage est réalisable à partir d’une paire de feuilles du tournesol ou des premières feuilles unifoliées du soja à la condition d’utiliser des protèges plants et de travailler à vitesse faible (environ 3 km/h). Par la suite, l’intervention peut être réalisée sans protèges-plants et en avançant dans le cycle, on peut se permettre d’augmenter la vitesse de passage (jusqu’à 8/10 km/h).
Les plages d’intervention doivent être décidées de manière à épargner la culture et à maximiser les chances de destruction des mauvaises herbes.
Qu’en est-il d’un point de vue économique ?
Terres Inovia a évalué l’efficacité technico-économique du binage comparée à plusieurs stratégies et modalités d’utilisation.
Les résultats présentés sur les graphiques ci-contre comparent ainsi des modalités de désherbage mixte du tournesol avec binage sur le plan technique d’une part (efficacité) et sur le plan économique d’autre part (coût et temps de travail).
Ils montrent que les modalités avec prélevée en plein, uniquement herbicide à dose pleine (référence) ou à dose réduite associée au binage (prélevée IFT), sont efficaces mais ce sont celles qui coûtent le plus cher.
La modalité binage(s) seul(s) est la plus compétitive en termes de coût avec une efficacité intéressante mais pas toujours satisfaisante en fonction de la pression adventice.
La modalité qui combine le meilleur rapport efficacité/coût est la prélevée localisée (dose pleine) -technique appelée « herbisemis » puis binage.
Claire Martin-Monjaret – Fanny Vuillemin
Terres Inovia