Publié le 17 décembre 2012
Une cinquantaine de personnes dans la journée. Plutôt satisfaisant pour un coup d’essai. De fait, la Chambre d’Agriculture de Haute-Garonne proposait, pour la 1ère fois, aux éleveurs du département de venir faire analyser leurs fourrages à l’antenne de Saint-Gaudens, ce 9 décembre dernier.
Coup double
Pascal Sanchez élève 75 mères limousines à Beauchalot. Ce n’est pas le travail qui manque chez lui mais pourtant, c’est sans hésitation qu’il est venu passer une bonne partie de sa journée à Saint Gaudens. « Ce type d’opération est doublement intéressant », explique-t-il. « D’une part, cela me permet de bénéficier d’une analyse à coût réduit. Alors que je paye une cinquantaine d’euros l’unité quand je vais dans un labo, l’analyse de mes deux échantillons d’ensilage d’herbe et de maïs m’aura couté 35 € HT. D’autre part, en réalisant ces analyses de groupe, cela me permet de rencontrer mes collègues éleveurs, de discuter et interpréter mes résultats avec les techniciens de la Chambre d’Agriculture et ceux du laboratoire. C’est tout de même plus sympathique que d’aller déposer ses échantillons et de repasser prendre ses analyses plus tard. » Pour rendre cette journée encore plus attractive, la Chambre d’Agriculture l’avait fait coïncider avec une réunion technique bovin viande, qui s’est tenue sur place, dans la matinée. À l’ordre du jour, bilan de l’activité de l’association Bovin Croissance et intérêt de la génétique. « Ça valait vraiment le coup de venir passer la journée », poursuit Pascal Sanchez. « C’est une opération qu’il faudra refaire. Avec tous les techniciens réunis au même endroit, on a pu prendre nos informations à la source et débattre entre nous sur les meilleures solutions pour nos élevages. C’est d’autant plus important qu’on a de moins en moins droit à l’erreur. Connaître la valeur réelle de ses fourrages pour savoir à quel type d’animal les donner et en quelle quantité, ou encore savoir comment équilibrer les rations, permet d’éviter les gaspillages. Le temps de l’approximation est dépassé. » À ses côtés, Patrick Soulé, éleveur à L’Isle en Dodon, décortique ses résultats d’analyse. « Mon fourrage est de bonne qualité mais je suis un peu faible en Unité Fourragère », constate-t-il. « Il va falloir que je complète ma ration en apportant de l’énergie. En fait, je n’ai pas de grosses surprises avec ces résultats. Comme beaucoup de collègues, je connais à peu près la qualité de mon fourrage et comment l’équilibrer. Mais entre se douter de la valeur et avoir les chiffres exacts, il y a une grosse différence. Avant, on vantait la qualité de l’alimentation de nos bêtes. Maintenant, on la prouve… »
À l’épreuve de l’infrarouge
Prouver la qualité d’un fourrage, c’est le travail d’Audrey Bousquet et François Arnaud. Ces deux techniciens du laboratoire d’analyse LIAL ont amené d’Aurillac une structure mobile permettant de réaliser des analyses fourragères par méthode infrarouge. Une longue table part du hall d’accueil de la Chambre d’Agriculture pour déboucher dans un chapiteau, greffé au bâtiment pour l’occasion. Au début de cette chaîne, Audrey déballe et identifie les échantillons de foins, enrubannage, ensilage d’herbe, de sorgho sucrier ou de maïs, amenés par les éleveurs. Ces échantillons sont séchés au four micro-onde (à l’exception du foin) et pesés pour en calculer la matière sèche. Ils sont ensuite broyés à 1 mm et disposés dans une capsule métallique. C’est François qui se charge de l’analyse au « spectromètre à absorption du rayonnement proche infrarouge ». Ce terme barbare désigne une technique qui consiste à exposer l’échantillon à un rayon infrarouge. Chaque élément chimique qui compose l’échantillon réagit différemment à cette exposition. Chacun réfléchit la lumière à des fréquences qui lui sont propres. Ces fréquences sont enregistrées, interprétées et, par des calculs mathématiques, vont pouvoir être associées à des valeurs alimentaires des matières organiques. « C’est une technique vieille de 25 ans », sourit François Arnaud. « Rien de bien sorcier. Les progrès ont surtout été faits dans la miniaturisation des équipements et l’évolution des équations mathématiques. On a maintenant des résultats plus précis et surtout plus rapides. » De fait, attelés à la tâche à 9h30, les 2 techniciens avaient déjà rendu 85 résultats d’analyse à 15 heure. Une centaine sera réalisée dans la journée. Auparavant peu utilisée ou alors proposée par les fabricants d’aliments, l’analyse de fourrage se répand de plus en plus. Malgré la diminution du nombre d’élevages, François Arnaud, qui exerce ce métier depuis une vingtaine d’années, réalise de plus en plus d’analyses. Et témoigne par la même occasion de l’amélioration de la quantité des fourrages qui lui passent entre les mains. « Il y a eu un vrai travail des éleveurs, notamment sur les stades de récolte », constate-t-il. « Et l’amélioration continue. C’est particulièrement flagrant sur le maïs. »
Une fois l’analyse achevée, place à l’interprétation des résultats. Ici, le laboratoire n’intervient qu’en cas de résultats incompréhensibles. Ce sont les techniciens d’élevage qui prennent le relais. D’où l’intérêt de cette opération qui alliait professionnalisme, convivialité et efficacité. Devant la satisfaction générale, peu de doutes que la Chambre d’Agriculture ne remette pas ça l’an prochain.