Publié le 10 mars 2015
Elle ne devait pas avoir plus de 6 ans. Ce samedi 20 décembre dernier, la petite fille est entrée, avec ses parents, dans la toute nouvelle boucherie de Christine et Alain Pollet, installée dans le quartier Borderouge à Toulouse. En ce jour d’ouverture, Jean-François Fournès, éleveur de bovins à Gragnague, et Serge Bouscatel, Président de l’association Produit sur son 31 qui fournit en partie le magasin, y assuraient une permanence pour aller à la rencontre des clients.
La qualité fait toujours recette
« Elle n’aime pas beaucoup la viande », explique le père, un peu embarrassé, alors que Jean-François Fournès proposait à la famille de goûter la vache issue de son élevage. Sauf qu’après avoir dégusté un morceau de rumsteck grillé « nature », la petite demande à en avoir un 2ème. Puis elle décide d’essayer un morceau de veau avec sa persillade. Avant de s’installer définitivement entre les deux agriculteurs, de façon à pouvoir « taper » allègrement dans leurs assiettes de dégustation, sous les yeux ébahis de ses parents. « Je crois qu’on vient de gagner une nouvelle adepte », sourit Alain Pollet, avant d’expliquer à ces premiers clients le « secret » d’une bonne viande.
Un secret qui n’en est pas vraiment un et qui tient surtout d’une recette simple : un animal de qualité et une maturation adéquate de la viande. Une façon de travailler que ce boucher quinquagénaire pratique depuis 34 ans. Passé d’abord par la grande distribution, il créera sa propre boucherie en 2002, dans une loge du marché couvert de St Cyprien, à Toulouse. En 2010, il confiera cette affaire à un de ses fils pour aller ouvrir une boucherie-traiteur à Auterive. Un commerce porté par un bouche-à-oreille flatteur qui s’avèrera florissant. Mais avec deux de leurs trois fils dans le métier, les époux Pollet décident de ne pas en rester là. Fin 2013, la société immobilière Belin Promotion les contacte pour leur proposer un local de 225 m² dans une zone urbaine en construction, à Borderouge. Situé devant la bouche du métro, l’emplacement semble prometteur. Fort du succès de leurs deux premières boucheries, ils décident de se lancer dans l’aventure. En changeant toutefois leurs habitudes d’approvisionnement.
En local, c’est encore mieux…
« J’ai toujours voulu travailler avec des producteurs locaux », confie Alain Pollet. « Jusque là, je m’approvisionnait en viande française mais je n’avais pas encore poussé la démarche jusqu’au bout. L’opportunité d’avoir une boucherie, aménagée comme je le souhaitais, dans un centre urbain important, et la tendance de fond des consommateurs de revenir au petit commerce de quartier m’ont incité à franchir ce cap. » Sa première démarche sera d’ailleurs quasiment la seule. Il contacte la Chambre d’Agriculture pour avoir des renseignements sur les éleveurs du département. Le boucher est tout de suite mis en relation avec Étienne Sassé, l’animateur de la plateforme d’approvisionnement local Produit sur son 31. Avec lui, il va visiter deux élevages adhérant à la plateforme. Des rencontres qui finissent de le convaincre. « Outre la qualité des viandes que j’achète, je peux maintenant parler à mes clients de la façon dont sont élevées les bêtes que je vends », se réjouit-il. « J’ai vu comment certains fabriquent eux-mêmes les aliments qu’ils donnent aux animaux. Maintenant, chaque fois qu’un nouvel éleveur intègre la plateforme, Étienne Sassé me propose d’aller visiter son exploitation. J’y prends des photos et me renseigne sur sa façon de travailler. Autant de sujets que je ne connaissais pas très bien auparavant, mais qui plaisent énormément aux clients de mon établissement. » Bœuf, veau, volaille et même légumes, une bonne partie des viandes et des ingrédients préparations culinaires vendues dans le magasin provient désormais de Produit sur son 31. Une proximité de l’approvisionnement qui étonne les consommateurs qui, pour beaucoup, ne pensaient pas qu’il y avait autant de productions différentes autour de Toulouse.
Concurrence ? Même pas peur !
Le 7 mars dernier, nouveau temps fort à la boucherie, avec l’inauguration officielle en présence des élus de la Chambre d’Agriculture, des responsables de la Plateforme et de la presse. L’occasion pour les époux Pollet de revenir sur les premières semaines d’activité. Le démarrage a été excellent pour un magasin tout juste sorti de terre, dans un quartier en pleine construction. Ouvert juste avant les fêtes de fin d’année, les chapons, conserves et plats cuisinés « festifs » ont remporté un franc succès et contribué à faire connaître le magasin dans les environs. Même si le mois de janvier a été un peu creux, comme pour beaucoup de commerces, le chiffre d’affaires progresse régulièrement. L’emplacement se révèle également judicieux. « Certains s’inquiétaient de la réputation du quartier », explique Alain Pollet. « Après ces quelques mois passés ici, je peux dire qu’il n’y a aucun problème. De nombreux commerces sont en train d’ouvrir et de nouveaux habitants arrivent tous les jours. Le quartier est en pleine mutation. C’était le moment d’en profiter. » Autour de la grande esplanade sur laquelle débouche la station de métro, on a vu ainsi arriver un banque, des petits commerces et surtout une grande surface. Pas de quoi inquiéter nos bouchers, pourtant. Ils y voient même un atout. « Le Carrefour Market ne propose que de la viande en barquette », précise Alain. « Nous visons donc à attirer les clients de cette grande surface pour qu’ils viennent compléter leurs achats chez nous. Nos prix sont assez proches des leurs, voire en dessous pour certains produits. Nous misons sur la qualité et la proximité de nos produits pour les convaincre et les fidéliser. »
Pour ce faire, Christine et Alain Pollet comptent renforcer le partenariat avec les agriculteurs et organiser régulièrement des rencontres avec les clients dans leur boucherie. Le magasin lui-même vaut aussi le déplacement. Avec ses 11 mètres de linéaire, son frigo vitré où trônent les carcasses en maturation et ses salles de découpes visibles des clients, la boutique, très lumineuse, respire le professionnalisme et inspire confiance. Et de fait, les retours des clients sont très encourageants. Souhaitons à ce nouveau magasin le succès qu’il mérite, pour le bien de ses gérants, de ses clients mais aussi de l’agriculture locale…