Publié le 25 février 2016
La vie de Jean-Claude Ferrot a basculé le 26 septembre 2013. Alors qu’il moissonnait son tournesol, cet agriculteur de Montégut, dans le Gers, est descendu dans la trémie pour vidanger les graines humides qui ne s’évacuaient pas. C’est alors que son pied droit a été happé par la vis de décharge.
« Double peine »
Seul dans son champ, Jean-Claude Ferrot a frôlé la mort de très près. Le pied arraché, il a réussi à joindre les secours avec son portable avant de sombrer dans l’inconscience. Héliporté en urgence au CHU de Rangueil à Toulouse, après avoir perdu quatre litres et demi de sang et fait un arrêt cardiaque, son pronostic vital était engagé. « Je dois la vie à la rapidité des secours et l’excellence du Dr. Molinier et de ses équipes », explique l’agriculteur. « J’ai été amputé au niveau de mon tibia droit. Je perdais la mobilité et l’autonomie, mais je sauvais l’essentiel. » Mais pour ce miraculé, comme il se définit lui-même, ce drame n’allait être que la première d’une série d’épreuves qu’il a cru ne pas pouvoir surmonter.
Alors qu’il ne peut, bien entendu, pas poursuivre son activité, son assureur tarde à réagir. « Les experts ont pris leur temps pour étudier mon cas », lâche-t-il, amer. « Du coup, je n’ai pas pu honorer plusieurs mensualités d’emprunt et ma banque m’a mis en interdit bancaire. À cause de cela, le versement de mes indemnités journalières a été interrompu pendant plusieurs mois. Pour couronner le tout, la MSA a refusé de prendre en charge une prothèse articulée qui aurait pu me permettre de reprendre mon activité d’entrepreneur de travaux agricoles. Je n’avais le droit qu’à une jambe de bois. Bref, je subissais une véritable double peine. » Alors que les difficultés s’accumulaient et que Jean-Claude Ferrot commencait à perdre espoir, le salut viendra de ses collègues agriculteurs.
La solidarité paye
Un de ses amis, Guylain Despax, s’alarme de la détresse de Jean-Claude Ferrot. Il fait alors appel aux adhérents de Gersycoop, dont ce dernier est sociétaire. La réaction ne se fait pas attendre. La coopérative met rapidement en place à fonds de dotation pour lui venir en aide. Dans le même temps, elle multiplie les contacts pour faire avancer le dossier de l’agriculteur auprès des différents organismes. Et les choses commencent à bouger. Jean-Claude Ferrot peut ainsi s’équiper d’une prothèse articulée, achetée à titre personnel. « Si j’avais dû me contenter de la prothèse en bois, il aurait fallu que je fasse adapter mes véhicules », souligne-t-il. « Cela aurait coûté beaucoup plus cher et je n’avais aucune garantie d’avoir le droit de conduire dans un cadre professionnel. Tandis que grâce à la prothèse articulée, j’ai pu récupérer tous mes permis, y compris le super-lourd. Une fois ma rééducation terminée, je pourrai reprendre presque normalement mes activités. » Dans la foulée de cette belle aventure humaine, Gersycoop décide d’aller plus loin. Devant l’élan de générosité des adhérents, mais aussi de l’intérêt porté à la démarche par la Fédération Régionale des Coopératives et d’autres partenaires, l’idée de créer un fonds de dotation pour accompagner d’autres agriculteurs touchés par des accidents de la vie fait son chemin.
« Réparer une injustice »
Avec Gersycoop comme premier partenaire, DONAGRI voit donc le jour fin 2015. Régi par la Loi du 4 août 2008, ce fonds de dotation vient en aide aux personnes issues du milieu rural, victimes de handicaps à la suite d’un accident survenu dans le cadre de leur activité professionnelle. À ce titre, DONAGRI peut conduire toutes sortes d’actions, telles que l’organisation de la collecte de fonds, la mise en place d’actions de communication, la réalisation de bilans de compétences, la définition d’une stratégie de réinsertion professionnelle ou encore l’accompagnement pour les formalités administratives consécutives à l’accident. « Dans le monde rural plus qu’à la ville, ces démarches relèvent du parcours du combattant », insiste Jean-Jacques Peyret, Président de Gersycoop. « Il était important, pour nous, de réparer cette injustice et rompre un dangereux isolement des victimes d’accidents graves. Mais il ne fallait pas nous arrêter en si bon chemin. Nous voulions que cette initiative gersoise soit déployée sur tous les territoires. »
C’est désormais chose faite. Particuliers, associations, entreprises, collectivités, tout le monde peut soutenir DONAGRI. Les dons donnent lieu à une déduction fiscale de 66%. A noter que les frais de structure étant intégralement supportés par les entreprises partenaires, chaque euro profite aux bénéficiaires retenus. « Les actions que nous engageons supposent la mobilisation de moyens significatifs, souvent de longue durée », rappelle Guylain Despax, qui a pris la présidence du fonds. « C’est pourquoi, plus les soutiens de DONAGRI seront nombreux et importants, plus nous pourrons aider de personnes du milieu rural, victimes d’accidents graves. » Et pour ce faire, quoi de mieux qu’un parrain emblématique ?
William Servat en renfort
L’ex-international toulousain connaît bien l’importance d’être soutenu et entouré dans les moments difficiles. Victime d’un accident grave qui a failli stopper sa carrière rugbystique, en 2005, il parviendra à force de travail à revenir à la compétition en 2007, pour être sacré meilleur talonneur du Monde en 2010. Issu du monde rural, William Servat a immédiatement accepté la proposition de parrainage. « Si j’ai eu la chance d’être suivi de près pendant ma convalescence, je sais qu’il n’en va pas de même dans le monde agricole », explique-t-il. « Le rugby partage avec le monde rural des valeurs fortes de solidarité. Mon engagement en tant que parrain de DONAGRI est donc ma façon d’exprimer l’amitié que je porte à celles et ceux qui y travaillent et de leur venir en aide. » Avec un gabarit comme celui de William Servat pour pousser, nul doute que DONAGRI va aller dans le bon sens et qu’on n’a pas fini d’en entendre parler…
Pour vous renseigner ou soutenir les actions menées par Donagri, rendez-vous sur le site internet de DONAGRI