Publié le 11 avril 2014
Pour Élodie et Matthieu Poidevin, le contrôle laitier, c’est du sérieux. Créée en 2009 à Cierp-Gaud, la Chèvrerie Cap Del Mail compte aujourd’hui 46 mères, produisant en moyenne 600 litres de lait chacune par an. « Nous sommes partis de zéro », rappelle Matthieu. « L’appui technique du contrôle laitier nous a permis de démarrer du bon pied, en évitant les erreurs de débutant. »
Savoir où on en est…
Tout le lait produit sur l’exploitation de 31 ha est transformé en fromages, sur place. Matthieu et Élodie écoulent ensuite leurs produits en direct, un tiers en vente à la ferme et le reste sur trois marchés hebdomadaires (deux à Luchon et un à Cierp-Gaud). Dès le début de leur activité, ils ont adhéré au Contrôle laitier, conjoint aux Chambres d’Agriculture d’Ariège et de Haute-Garonne. « Plus que le contrôle en lui-même, ce sont les conseils en alimentation et en reproduction qui nous ont d’abord été le plus précieux », explique Matthieu. « Puis on s’est rapidement pris au « jeu » du suivi de la qualité pour faire progresser notre élevage. » À partir des mises bas, début mars, ils reçoivent la visite du contrôle laitier un fois par mois. Il y a d’abord la pesée, puis Yohan Valette prend le relais pour analyser les chiffres et les conseiller en conséquence. « Sans contrôle laitier, on ne peut pas savoir exactement où on en est », ajoute Élodie. « Par exemple, une chèvre peut produire beaucoup de lait, mais avec des taux protéiques et butyreux médiocres. Tandis qu’une autre, produisant un peu moins, peut avoir un lait de bien meilleure qualité. C’est donc celle-là qu’il faut privilégier dans notre système fromager. Grâce aux chiffres, Yohan peut ainsi nous sortir un Top 10 des femelles à inséminer en priorité. »
Les éleveurs apprécient également l’œil extérieur du technicien. De fait, lors de ses passages, Yohan Valette analyse plus vite l’état des animaux que les éleveurs, qui vivent avec à longueur d’année. Il ressort de ces observations de vrais échanges entre éleveurs et technicien. « On n’est pas toujours d’accord sur tout », note Matthieu. « Par exemple, il a proposé d’augmenter l’azote dans les rations des chèvres. Sauf qu’en production fromagère, le lait provenant d’une alimentation riche en azote pose des problèmes pour la fabrication et la qualité des fromages. Yohan a donc adapté son conseil à nos besoins et nos spécificités. Il ne vient pas avec des solutions toutes faites, ce qui rend nos discussions intéressantes et constructives. »
Un système simple
Partis d’une feuille quasiment vierge, Élodie et Matthieu ont opté pour un système d’élevage le plus simple possible. Ils ont opté pour le tarissement des chèvres, de fin décembre à début mars. Cette trêve hivernale est alors mise à profit pour lever le nez du guidon et réaliser des travaux. La première année, ils ont ainsi rehaussé le quai en béton de leur salle de traite et surtout installé un couloir d’alimentation central. « Ce couloir nous a fait gagner 1h30 de travail par jour », se réjouit Élodie. « Ça nous a changé la vie, voire sauvé la mise car je ne sais pas si on aurait tenu longtemps avec le rythme de travail qu’on avait alors. » Le tarissement n’arrête pas pour autant la fabrication de fromage. Le couple a, en effet, 3 vaches jersiaises, une race rustique, qui prennent le relais. Traites à la main, elles permettent de maintenir une petite activité fromagère et de soutenir la trésorerie durant l’hiver.
Côté alimentation, les chèvres sont essentiellement à l’herbe et pâturent environ 10 mois par an. « Avec Yohan, nous avons testé différents types d’alimentation », précise Matthieu. « Mais, autant en termes de coût que de performances, on n’a pas trouvé mieux que l’herbe. »
L’atout du contrôle laitier pour l’insémination
Classées par Yohan Valette, la meilleure moitié des chèvres de leur troupeau est en insémination artificielle. Les doses de semences proviennent de Capgènes qui est l’organisme de sélection de la plupart des races caprines françaises. « Adhérer à Capgènes permet d’avoir des semences de boucs de catégories supérieures », poursuit Matthieu. « Or on ne peut y adhérer que si l’on est au contrôle laitier… » De fait, Capgènes compile les données morphologiques des chevrettes, notées une fois par an par un technicien, avec les résultats du contrôle laitier. Le tout sert à établir un ICC (Index Combiné Caprin) qui donne une vue d’ensemble de l’élevage caprin national et, par la même occasion, permet à l’éleveur de se situer par rapport aux autres élevages. Pour inséminer l’autre moitié du troupeau et essayer de rattraper celles qui n’ont pas pris en IA, Élodie et Matthieu gardent toujours un ou deux boucs sur l’exploitation. Les mâles sont engraissés et vendus en direct. « Nous avons tout vendus l’an passé », précise Élodie. « Mais comme nous avons augmenté le troupeau cette année, ceux que nous ne pourront écouler seront revendus à un engraisseur. »
Au final, le contrôle laitier coûte à nos deux éleveurs dans les 1.000 € par an, avec un montant forfaitaire identique pour tout élevage auquel s’ajoute une cotisation par nombre de bêtes. Un investissement, certes, mais qu’Élodie et Matthieu ne regrettent pas. « Il faut relativiser », estiment-ils. « Cela représente l’équivalent de 10 litres par chèvre/an. Comme Yohan est de bon conseil, ce coût est vite compensé par les gains qu’on en retire. Sans oublier qu’il ne compte pas son temps. Chaque visite dure une bonne demi-journée et, en dehors des périodes de production, il passe toujours au moins une fois pendant l’hiver pour superviser le tarissement et préparer les rations pour les mises bas. »
Élodie et Matthieu n’ont donc pas l’intention d’arrêter le contrôle laitier. D’autant que les affaires marchent plutôt bien. Le temps de se faire connaître sur les marchés ou auprès des touristes et curistes des environs, et les ventes ont très vite décollé. Et la clientèle est fidèle. « On s’est encore retrouvés en rupture de stock, cet été », sourit Élodie. « Sauf que c’est arrivé un mois plus tôt qu’en 2012. Si c’est plutôt bon signe, il va quand même falloir qu’on s’améliore sur notre gestion des stocks. Mais si c’est le seul problème qu’on a, on devrait y survivre. » C’est tout le mal qu’on leur souhaite…
- SAU : 31 ha tout en prairies et parcours
- 46 mères de race alpine
- Production annuelle moyenne par mère : 600 litres
- Taux moyens : 34,7 (TP) et 41,8 (TB)
- Salle de traite : 6 postes – 12 places au quai
- Investissements matériels : 10.000 € pour la machine à traire (seul matériel neuf acheté sur l’exploitation) et 4.000 € pour les aménagements.
- Investissement total : 120.000 € d’immobilisations et 12.000 € de cheptel
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