Publié le 27 avril 2011
Triste spectacle pour la démocratie locale que celui offert par certains élus locaux, ce 4 avril à la salle Ribatel de Buzet/Tarn. Ce soir-là avait lieu une réunion publique de concertation sur le projet des « Portes du Tarn ». Réclamée à cor et à cri par la population locale et l’Association de Sauvegarde des Coteaux (ASC), inquiètes du peu de communications et du manque de concertation, cette réunion a fait salle comble, avec plus de 300 personnes venues des communes de Buzet et Saint Sulpice. À la tribune, le Président du Conseil Général du Tarn, Thierry Carcenac, venait défendre ce projet de ZAC (Zone d’Aménagement Concerté), aux côtés de Jacques Esparbié, Président de la Communauté de Communes Tarn et Agout (CCAT), de Philippe Quillet, directeur de la SEM 81 (Société d’Économie Mixte du Tarn, maître d’ouvrage, dont Thierry Carcenac est Président), d’André Laur, Conseiller Général du canton de Montastruc, de Bernard Soulet et de Jean-Claude Carrié, maires de Saint Sulpice et de Buzet.
On prend le même et on recommence…
Tout est parti du PLU de Buzet (voir notre article du 10 décembre 2010). « C’est incroyable ! » tempête Laurent Maresse, Président de l’Association de Sauvegarde des Coteaux (ASC). « Le PLU présenté en décembre dernier a été retoqué par les services de l’État et la commissaire enquêteur, pour son impact négatif sur Buzet. Le 11 février, le conseil municipal décide dans sa délibération de reprendre l’ensemble de la procédure du PLU depuis le début. Et celui qu’on nous présente aujourd’hui est strictement identique à l’ancien. De qui se moquent-ils ? » Car ce qui déchaîne les passions dans ce PLU, c’est la ZAC des Portes du Tarn. Pour rappel, cette zone de 242 ha, à cheval sur les communes de Buzet et Saint Sulpice, comprendrait une plateforme logistique et de distribution dotée d’un embranché fer, un pôle de services et de commerces, des espaces verts et des zones d’habitation. « De ce projet, pas un mot de la part de la municipalité de Buzet », lâche Dominique Vincent, agriculteur de la commune potentiellement « expropriable » si le projet voit le jour. « Il n’y a qu’à voir le nombre d’agriculteurs présents ce soir pour mesurer la réelle inquiétude de la profession de voir des décennies d’aménagements et d’investissements personnels et publics balayées par une ZAC sans réelle justification. »
L’art consommé du mépris
Des justifications, c’était bien ce qu’étaient venues chercher les 300 personnes, ce soir-là. Ils en furent pour leurs frais… Après une présentation du projet sans surprise puisqu’on la trouve déjà sur le site internet de la CCAT, les questions ont commencé à fuser. Dominique Vincent a une nouvelle fois rappelé l’impact dramatique de cette ZAC pour l’agriculture locale et réaffirmé la décision de la profession agricole de se battre pied à pied contre ce projet, qui a déjà reçu un avis défavorable de la Chambre d’Agriculture de Haute-Garonne. Pour Laurent Maresse, le comble était atteint quand il a demandé à Thierry Carcenac pourquoi la contre-proposition faite par l’ASC sur un projet alternatif aux Portes du Tarn – sans embranché fer, ni expropriation et préservant les terres agricoles – n’a jamais été étudiée. À en juger par la réaction du Président du Conseil Général, il semble que cette proposition, pourtant approuvée par les services de l’État, ne lui ait jamais été transmise par la mairie de Buzet ou le CCAT. Pressés de s’expliquer par de nombreux participants sur cette attitude, Jean-Claude Carrié s’est borné à répéter que ce projet était une opportunité à ne pas rater et Jacques Esparbié n’a trouvé d’autre méthode que de se livrer à une incroyable démonstration de mépris. Pour ce dernier, l’opposition de seulement 300 personnes venues « faire la claque » pour quelques « tribuns » (sic) ne vaut rien. « Il y a 10.000 habitants concernés par ce projet », lançait-il à l’assistance. « J’en déduis que 9.700 sont d’accord avec ce projet puisqu’ils ne sont pas venus. » Chacun appréciera…
Si la soirée a permis à ceux qui le souhaitaient d’exprimer ce qu’ils avaient sur le cœur, elle aura par contre été très pauvre en réponses. Dans un communiqué de presse paru le surlendemain, l’ASC déplorait que « les porteurs de ce projet (n’aient) donné aucune réponse aux questions pertinentes et légitimes de l’assemblée » et dénonce une « suite de chiffres incohérents : aucune entreprise n’est annoncée, aucun budget prévisionnel, aucun financement. La seule justification est la promesse de 2.000 emplois hypothétiques dans 20 ans. » Pour de nombreux participants, la cause de l’entêtement de la SEM 81 sur ce projet est cependant simple : faire financer, par la ZAC, le contournement de Saint Sulpice et de l’échangeur autoroutier. « Si j’étais tarnais, je signerais des 2 mains », déclarait Charles Calléja, arboriculteur à Buzet. « C’est tout bénéfice pour le Tarn, les inconvénients de ce projet étant déplacés chez nous. »
Du côté de la mairie de Buzet, Jean-Claude Carrié a seulement annoncé qu’il y aurait une réunion publique sur le seul PLU prochainement. Quant à la ZAC, le site internet de la mairie affiche de façon laconique : « La dernière réunion publique a eu lieu sur Buzet, le 4 avril 2011. Le projet présenté à cette occasion sera bientôt publié, ainsi que ses modifications éventuelles issues de cette réunion. » Mais pour les habitants, une chose est entendue : ils n’en resteront pas là.