Interview : Jean-Michel Anxolabehere, président de l’Association des Chambres d’Agriculture des Pyrénées (ACAP).
“Une étape importante pour le monde agricole pyrénéen”
Quel sont l’objet et les objectifs de cette étude ?
Jean-Michel Anxolabehere : L’étude « Stratégie de développement de l’agriculture de montagne et du pastoralisme dans les Pyrénées pour l’après 2013 » a commencé début 2010 et a été conduite par l’ACAP. Ce séminaire est une étape importante mais pas une restitution finale car celle-ci aura lieu fin 2011. L’étude vise à identifier les leviers et outils pour maintenir et orienter l’élevage pyrénéen vers plus de viabilité. Le but est d’avoir un support objectif sur les Pyrénées afin de se distinguer des autres massifs.
Cette étude tente de positionner l’agriculture pyrénéenne à la veille de décisions européennes importantes. L’après 2013 inquiète en effet le monde agricole…
J-M.A. : En effet, il demeure encore beaucoup de questions sur les décisions et orientations qui seront prises pour l’après 2013. C’est une date importante pour le monde agricole et particulièrement pour l’agriculture de montagne. Mais le niveau des aides perçues n’est pas du tout à remettre en question ici. La motivation porte sur le besoin de faire un état des lieux de l’agriculture du massif. La seconde motivation est justement de maintenir certaines aides prenant en compte les handicaps naturels des zones de montagne, notamment pour certaines productions. Il y a une volonté forte de savoir ce qu’il est possible de mettre en œuvre pour sauvegarder notre pastoralisme pyrénéen.
Cette étude donne la parole au terrain, aux agriculteurs, mais aussi à l’ensemble des acteurs du massif pyrénéen.
J-M.A. : Aujourd’hui plus que jamais, nous nous rendons compte que le développement local et le maintien du tissu agricole doivent se faire en lien avec l’industrie, le tourisme, l’artisanat. L’aménagement du territoire est un point fort et même central de notre travail. Nous ne pouvions exclure cela. Il nous fallait avoir une approche multisectorielle. L’intégration des politiques publiques dans ce projet est un véritable atout. Le massif représente de multiples traditions, histoires, agricultures… C’est un patrimoine riche et diversifié. Nous avons, sur ce territoire, des produits et des savoir-faire remarquables. Pour pouvoir les porter et développer de nouvelles filières pyrénéennes, il est nécessaire de nous fédérer et de faire (re)connaître notre identité au travers de l’image forte de la chaîne.
Une étude militante…
J-M.A. : Oui sans aucun doute. Aujourd’hui, les pyrénéens ont décidé de faire connaître leur identité. Jusqu’à présent, il faut avouer que nous étions plutôt des suiveurs. Désormais, nous nous affirmons. Cette initiative doit bénéficier au monde agricole pyrénéen et aux vallées de nos montagnes, à la vie locale, à son économie. Au final, c’est un argument d’attractivité.
Comment voyez vous les Pyrénées dans 20 ans ?
J-M.A. : Je crains que certaines parties du territoire souffrent de l’exode rural et de l’abandon de l’espace. Malheureusement, il est fort probable que des zones deviennent sauvages par manque d’entretien. Certaines traditions culturelles et historiques risquent aussi de disparaître ou de se faire oublier. Toutefois, je pense aussi qu’il y a une volonté de plus en plus forte de nombreuses personnes de ne pas perdre ce patrimoine. Nous sommes aujourd’hui à un moment crucial. Les pyrénéens peuvent faire preuve d’innovation tout en conservant leurs traditions. Je crois même que l’un ne va pas sans l’autre. C’est une phase de sursaut. Nous ne pouvons pas être énormément productifs sur ce territoire, par contre nos produits sont de grande qualité. À nous de nous fédérer pour que, dans les années à venir, de nouvelles filières, mariées aux Pyrénées, connaissent des débouchés intéressants pour les agriculteurs. Nous devons encore beaucoup travailler, mais il me semble qu’un pas important est fait dans ce sens grâce à cette étude.
Propos recueillis par J.SIMOES