Publié le 23 avril 2014
Depuis 5 ans, le projet controversé de ZAC « Portes du Tarn » a fait couler beaucoup d’encre. Porté par la communauté de communes Tarn-Agout (CCAT) et le Conseil Général du Tarn, ce projet déboucherait sur la naissance d’un parc d’activités économiques et la création d’un échangeur permettant le contournement de Saint-Sulpice-la-Pointe (81) vers Buzet (31). Les habitants de ces deux communes, les plus concernées par la ZAC, ont vite émis des réserves sur le bien-fondé d’une zone logistique dans un territoire qui en compte déjà plusieurs. Réserves qui se sont muées en inquiétude, puis en franche hostilité devant l’absence de concertation et les nombreuses zones d’ombre qui émaillaient le dossier. Réunions publiques, manifestations et création de plusieurs collectifs ont permis d’instaurer un début de débats sur le sujet. Mais le projet avance toujours, vaille que vaille. Une semaine avant les élections municipales, les Préfet de Haute-Garonne et du Tarn ont ainsi signé l’arrêté interdépartemental déclarant le futur chantier d’Utilité Publique. L’affaire serait-elle pliée ? Pas sûr, si l’on en croit les déclarations de Gilles Joviado, nouveau maire de Buzet et opposant de la première heure à ce projet.
La ZAC fait l’unanimité… contre elle
Il semble que les « Portes du Tarn » ait été l’élément cristallisant des campagnes des élections municipales dans tout le territoire impacté. « Le passage en force des deux préfets sur la DUP, malgré les importantes réserves des commissaires enquêteurs, n’a pas arrangé les choses », estime Gilles Joviado. « D’autant plus que la commune de Roquesérière, qui n’était pas concernée au début, s’est retrouvée subitement intégrée au projet. Les commissaires ont reconnu n’avoir jamais vu une telle mobilisation de la population pour une enquête publique (qui s’est déroulée du 8 novembre au 8 décembre 2013 – ndlr). Pourtant, en dépit de cette opposition et des réserves du commissaire enquêteur, qui demandait de revoir la copie notamment sur la dimension de la ZAC, l’embranché fer et la consommation inutile de terres agricoles, les préfets sont passés outre, sans motiver leur décision. À se demander à quoi sert ce genre de consultation… »
Mais le résultat des élections municipales pourrait bien changer la donne. Les communes de Buzet et Saint Sulpice ont basculé vers des listes hostiles au projet. La liste de Gilles Joviado (sans étiquette) a remporté 52,66% des suffrages et celle de Dominique Rondi Sarrat (union PS/Verts) a réalisé 43,86%. Autre donnée d’importance, Jacques Esparbié, initiateur et farouche partisan des Portes du Tarn, a perdu son siège de Président de la CCAT suite aux élections. Son successeur sera désigné le 28 avril.
Proposition alternative
Gille Joviado a été, un temps, Président de l’Association de Sauvegarde des Coteaux (ASC), créée en 2003, pour surveiller les projets concernant l’environnement local. Regroupant nombre d’habitants, professionnels et agriculteurs de Buzet, l’ASC avait longuement travaillé à l’élaboration d’une proposition alternative à la plateforme logistique prévue dans cette ZAC. « Même si nous étions conscients de la nécessité de dynamiser l’économie buzétoise, il était impensable de condamner un espace agricole aujourd’hui très performant, grâce à un soutien financier important de l’Europe, de l’État et des collectivités territoriales », précise Dominique Vincent, agriculteur de la commune et élu sur la liste de Gilles Joviado. « Comment accepter que tout l’argent investi depuis des décennies dans le remembrement, l’équipement, l’irrigation et le drainage des terres soit gaspillé par un projet sans rapport avec l’environnement local ? Nous avons donc réfléchi à un projet qui s’appuie, entre autres, sur l’économie agricole locale, l’éducation et la recherche. » Cette proposition alternative, présentée au Conseil Régional, à Midi-Pyrénées Expansion, à l’Agence de l’eau et la Chambre de Commerce de Haute-Garonne, a reçu un très bon accueil de la part des élus. « Mais tous nous ont dit que, même si notre projet tenait la route, il fallait être élu pour être entendu », ajoute Gilles Joviado. « Maintenant que c’est chose faite, nous allons enfin avoir accès à tous les éléments de ce dossier et, en concertation avec les habitants et les conseils municipaux des communes concernées, pouvoir enfin étudier la faisabilité des propositions alternatives. »
Pour l’heure, la nouvelle équipe se met en place. Après des mois de campagne épuisante et l’euphorie de la victoire, la prochaine étape sera l’installation du conseil communautaire de la CCAT. « Il n’y a pas que les Portes du Tarn dans notre programme », sourit Gilles Joviado. « Notre liste a plu aux électeurs par sa diversité de compétences et de profils. Nous avons du pain sur planche, mais l’ambiance au sein du conseil municipal est des plus stimulantes. Si nous arrivons à garder cet esprit tout au long du mandat, je suis sûr qu’on pourra faire de belles choses. »