Publié le 8 février 2013
En 2010, Euralis a lancé un plan de transformation global et ambitieux et les premiers résultats sont au rendez-vous. Sur l’exercice 2011-2012, clos au 31 août dernier, 3 Pôles sur 4 enregistrent des résultats en forte progression. Des efforts de réduction de coût permettent aux agriculteurs d’optimiser leurs revenus. Le Groupe focalise sa croissance sur des marchés porteurs en France et à l’international. « Ce plan de transformation est ambitieux », déclarait Christian Pèes, Président d’Euralis, lors de l’Assemblée Générale d’Euralis Coopéval à Muret, le 5 février dernier. « Notre objectif est d’augmenter le revenu disponible des agriculteurs, en construisant des filières performantes qui permettront à notre coopérative de se développer à long terme. Notre stratégie de croissance vise un chiffre d’affaires de 2 milliards d’euros en 2020. Nous avons initié un effort considérable de renforcement de notre compétitivité et de focalisation sur nos atouts. »
Quatre pôles qui confirment leurs atouts stratégiques
Avec un niveau de collecte exceptionnel d’1 million de tonnes de céréales, le Pôle Agricole affiche un résultat d’exploitation de 7 millions d’euros, en hausse de 42 %. Ces résultats s’expliquent notamment par la poursuite des efforts de réduction des coûts en faveur des agriculteurs. La mise en œuvre d’un dispositif logistique mutualisé avec un partenaire coopératif a ainsi permis de baisser, en 2 ans, le coût de collecte de 15 % et de faire ainsi économiser 3 millions d’euros aux adhérents de la coopérative. Le Pôle a enfin mis en place un Contrat de progrès qui a pour objectif d’identifier et d’accompagner la mise en œuvre des projets de développement de chaque agriculteur.
Dans un contexte de consommation difficile, le Pôle Alimentaire, qui rassemble les activités foie gras et traiteur d’Euralis, fait face à la hausse des prix des matières premières. Les résultats du Pôle, avec 3% de baisse du chiffre d’affaires et un résultat négatif, sont également impactés par la réorganisation industrielle, réalisée en 2012 sur le périmètre Traiteur. Pour restaurer sa compétitivité, le Pôle a donc engagé des chantiers clefs qui visent à économiser au total 15 millions € sur 2 ans. Ils portent notamment sur l’optimisation du dispositif industriel et logistique du périmètre Traiteur, la simplification des gammes et l’optimisation des achats d’emballages. Sur l’exercice, le Pôle obtient tout de même des résultats encourageants sur ses leviers majeurs de croissance. La marque de foie gras Rougié enregistre ainsi une croissance à l’international sur des marchés clefs, comme le Japon qui progresse de 20 %. Le rayon coupe et frais emballé en GMS affiche une progression de 14 % du chiffre d’affaires. Il a été multiplié par 2 sur les 4 derniers exercices.
Avec sa marque Euralis Semences, le Pôle Semences compte parmi les leaders européens en semences de maïs, tournesol, colza, sorgho et soja. Il maîtrise intégralement tous les métiers de la filière : recherche, production et commercialisation. Le chiffre d’affaires du Pôle s’établit à 141 millions € (+12 %), soit une progression de 70% sur les 5 dernières années ! Le résultat d’exploitation de 21 millions d’euros progresse de 20 %. Le Pôle confirme sa dynamique, avec l’extension de son bassin de production en Ukraine et le renforcement de la force commerciale en Europe de l’Est, qui est passée de 60 à 80 commerciaux.
Enfin, le Pôle Participations et Développement affiche un bilan positif, avec une progression de 66 % de son résultat d’exploitation. Ce Pôle réunit les partenariats industriels, les participations financières et les activités agricoles situées hors du territoire coopératif du groupe. L’ensemble des activités qu’il regroupe a pour mission de permettre à ses adhérents de diversifier leurs productions, de développer leurs exploitations et de leur garantir des revenus sécurisés via des productions contractualisées. Parmi les activités marquantes, citons la production de chanvre, qui double ses surfaces avec 1.800 hectares semés, et le projet de création d’une filiale commune de nutrition animale avec Sanders Adour.
Des objectifs ambitieux
« L’exercice démarre dans un contexte de cours des matières premières élevés et un environnement économique difficile sur les marchés agroalimentaires », notait Pierre Couderc, directeur du groupe Euralis. « Toutefois, avec la situation plus favorable sur les marchés agricoles, céréales et semences, nous pensons atteindre nos objectifs pour 2013, qui est la stabilité du chiffre d’affaires et du résultat d’exploitation, ainsi que le retour à l’équilibre pour le résultat net. » Pour y parvenir, le groupe Euralis compte accélérer le développement à l’international de Rougié, avec notamment l’inauguration d’un deuxième site de production de foie gras en Chine avant fin 2013. Le Pôle Alimentaire va, d’une part, poursuivre son effort de compétitivité, avec notamment l’investissement de 7 millions d’euros sur le site d’Yffiniac, en Côtes d’Armor. D’autre part, il compte focaliser son offre aux Bouchers Charcutiers Traiteurs sur les produits leaders du marché. Le pôle Semence compte accélérer sa croissance en Europe de l’Est et augmenter de plus 1.000 hectares, l’offre de production de semences sur son territoire coopératif. Enfin, Euralis va mettre en place une nouvelle gouvernance territoriale, associant agriculteurs-coopérateurs et salariés, pour développer les Contrats de progrès.
- Le chiffre d’affaires brut atteint 1,58 milliard d’euros.
- Le chiffre d’affaires net s’établit à 1,32 milliard d’euros.
- Le résultat d’exploitation ressort à 20 millions d’euros.
- Le résultat net est de 7 millions d’euros, hors éléments exceptionnels.
- En 3 ans, la dette a baissé de 76 millions d’euros.
Une Grande Gueule à Muret
Ceux qui écoutent RMC le connaissent bien. Pascal Perri, économiste et commentateur régulier du Grand journal de l’économie sur BFM, sévit depuis 2006 dans la célèbre émission « Les Grandes Gueules » d’Alain Marschall et Olivier Truchot. Jean-Claude Labit, Président d’Euralis Coopéval, avait donc convié un invité hors-normes à prendre la parole lors de l’Assemblée Générale de Muret, pour aborder l’avenir du modèle coopératif. Grande gueule certes, Pascal Perri maitrisait néanmoins parfaitement son sujet. Il faut dire qu’en 2009, il a édité avec Georges Lewy, un expert européen des marques, « Les défis du capitalisme coopératif », un ouvrage consacré aux conséquences de la mondialisation agricole et au modèle coopératif, qui représente 45 % de l’agroalimentaire en France.
La théorie du grand U
Après avoir brossé un tableau de la mondialisation en agriculture et pointé le manque cruel de soutien de l’Union Européenne à ses producteurs, contrairement à ce que font l’ensemble des autres puissances agricoles, Pascal Perri s’est attaché à décrypter les changements d’habitudes alimentaires et les stratégies qu’il faut mettre en place pour s’y adapter. « Imaginez une courbe en forme de U majuscule », proposait-il à l’assistance. « C’est ce à quoi ressemble le marché aujourd’hui, avec les prix bas sur la gauche du U et les prix élevés sur la droite. Le marché s’est creusé par le centre. De fait, de plus en plus de consommateurs arbitrent leurs achats par le prix. Le raisonnement est : « J’achète ce produit pour le service qu’il me rend et non pour sa publicité ou son marketing. À moins que le produit ne m’apporte une réelle valeur ajoutée qui justifie que j’y mettre le prix. » Donc, soit on est les champions du premier prix et ce sont les volumes qui comptent. Soit on est les champions du produit unique et le prix disparaît derrière la valeur. » Dès lors, les produits qui ne sont pas identifiés comme étant les moins chers ou ceux à plus forte valeur ajoutée, c’est-à-dire le milieu de gamme, voient leur part de marché s’effondrer. C’est le creux du U.
Les atouts du modèle coopératif
Pour l’économiste, il n’y a plus de place pour des initiatives individuelles, dans le monde d’aujourd’hui. Le modèle coopératif est donc incontournable. Le constat est simple : sur la chaîne de valeur ajoutée, les producteurs sont en difficulté, les transformateurs ne s’en sortent pas trop mal et les distributeurs ont la majeure partie du bénéfice, car ils sont en direct avec le consommateur. Une filière coopérative qui maîtrise toute la chaîne peut donc venir concurrencer la grande distribution sur le terrain du local, de la proximité et des valeurs. Les coopératives devraient, pour cela, adopter une stratégie de dédoublement. Une marque historique serait dédiée à des produits de valeurs et une filiale proposerait des produits de discount. Pascal Perri estime que cela peut fonctionner à condition de séparer les équipes qui travaillent sur le sujet et de réduire les coûts de transformation et d’intermédiation. « Il y a forcément des solutions pour gagner de la productivité », ajoutait-il, avant d’enchainer sur la communication. « Pour percer, une marque doit être connue, aimée et choisie. Votre marque coopérative Agriconfiance est peut-être aimée, mais elle n’est ni connue, ni choisie. Il faut que les coopératives se réapproprient la communication « terroir » dont s’est emparée la grande distribution. Et il faut communiquer positivement. Les circuits courts peuvent vous y aider, même s’ils ne peuvent être l’unique solution comme on l’entend un peu trop. Vous avez aussi l’agrotourisme mais rien ne remplacera un plan de communication grand public. Il faut que le monde agricole arrive à se vendre au travers des émissions de télé, que ce soit des reportages ou des docu-fictions. »
Pour conclure, notre Grande Gueule rappelait les forces majeures du modèle coopératif. Ancrées dans leurs territoires et non délocalisables, les coopératives créent des richesses, des emplois, des services, etc. « Vous êtes l’inverse du « court-termisme » dont on accuse les multinationales ou le monde de la finance et de l’économie », insistait-il. « Vous êtes dans l’engagement à long terme avec vos coopérateurs, avec qui vous partagez le capital, mais aussi avec la société. Vous pouvez offrir à vos adhérents des perspectives qui, si elles impliquent parfois de gagner un peu moins, permettent de gagner plus longtemps. Et votre taille vous permet de gagner en productivité et aussi d’aller chercher la valeur ajoutée là où elle se trouve, à l’étranger s’il le faut. C’est un modèle qui peut concilier croissance et efficacité économique, sans oublier son identité et en respectant sa territorialité. Car un coopérateur voudra toujours pouvoir pousser les portes des dirigeants de « sa » coopérative. Il faut donc instaurer des structures intermédiaires de gouvernance. » Un conseil qu’Euralis a déjà commencé à appliquer.
Merci à Marjolaine Alary (Euralis) pour sa collaboration à la rédaction