La restauration scolaire à l’épreuve du local

Publié le 23 août 2010

« Une image vaut mille mots », dit un dicton chinois. Que dire alors d’une visite complète d’une exploitation maraîchère bio ? Elle vaut tous les discours du monde. C’est partant de ce principe que la Chambre d’Agriculture de la Haute-Garonne a proposé à Elisabeth Belaubre, 3e adjointe au maire de Toulouse, en charge de l’environnement, la santé et la restauration, de rencontrer Marc et Corinne Bonnefous. Ces derniers cultivent des légumes de saison bio, du côté de l’Union, à Toulouse. Créée en 1985, l’EARL Borde Bio propose en vente à la ferme, en magasins spécialisés et sur le marché du Capitole, la production de ses 7.000 m² de serres, implantées sur le petit hectare et demi avec lequel le couple a débuté. Pionniers de l’agriculture biologique, les Bonnefous bénéficient d’une expérience et d’un recul de 25 ans en la matière. Ils étaient donc tout indiqués pour présenter à la mairie de Toulouse, un panorama complet et objectif de leur activité. Participaient également la DDT et Erables 31 (Groupement départemental des agriculteurs bio).

Alimentation bio contre alimentation locale…

Le souhait de Madame Belaubre est de faire passer toute la restauration scolaire en bio. Vaste projet qui bute sur un problème crucial : l’approvisionnement local. C’est surtout autour de ce point qu’ont porté les débats. Pour Marc Bonnefous, produire bio en Midi-Pyrénées est assez difficile. Certaines productions sont même quasiment impossibles à mener, comme les carottes, dont la restauration collective est tout de même friande. Pour lui, la culture biologique est avant tout un état d’esprit. « Ma femme et moi sommes des militants du bio », expliquait-il. « Et c’est en tant que tels que nous pensons que le bio est incompatible avec les marchés de masse. Nous voyons déjà les premiers effets néfastes de l’arrivée des grandes surfaces sur ce marché. Les distributeurs, y compris ceux spécialisés en bio, commencent à vouloir nous mettre en concurrence avec des productions lointaines et, pour certaines, avec des cahiers des charges tout aussi « exotique ». C’est pour nous un vrai danger et une évolution qui nous inquiète fortement. » Pour Yvon Parayre, Président de la Chambre d’Agriculture 31, vouloir du bio « à tout prix » est une voie risquée, qui amènerait les producteurs bio dans la même impasse que les conventionnels.

« L’agriculture conventionnelle doit prendre le relais »

Ce n’est pas une déclaration de la Chambre d’Agriculture mais bien de Marc Bonnefous lui-même. Malgré ses convictions profondes, son souhait de voir davantage de conversion au bio et son incontestable technicité, il a clairement énoncé les limites du projet de la mairie. Aux productions difficilement compatibles avec le climat du Sud-Ouest s’ajoute les problèmes de la saisonnalité, que la restauration collective n’arrive toujours pas à intégrer, et de la sur-(ou sous) production suivant les périodes. « Mes tomates arrivent quand tous mes clients sont en vacances et que les marchés sont désertés », donnait-il en exemple. « Résultat, je les donne au Secours Populaire… »

C’est justement sur ces points qu’Elisabeth Belaubre veut travailler. « Avec les cuisines centrales municipale, je compte bien sensibiliser et instaurer la notion de saisonnalité », a-t-elle proposé. « De même, j’ai un projet de légumerie qui me tient à cœur. Cela nous permettrait d’acheter en local, puis de peler, précuire et conditionner les légumes pour nos besoins propres. Votre problème de tomates pourrait être un des problèmes que pourrait résoudre la légumerie. »

Les échanges de ce type se sont poursuivis pendant deux heures, entre tous les participants à la visite. Une excellente chose pour des structures et des personnes qui, trop souvent, s’observent davantage qu’elles n’échangent. L’approvisionnement local est l’avenir de l’agriculture. De toutes les agricultures. Ce jour-là, c’est l’ensemble des participants qui a progressé dans cette voie.

Auteur de l’article : Sébastien Garcia