Publié le 20 octobre 2016
Le monde va de plus en plus vite. Entre fascination, excitation ou angoisse, États, entreprises et citoyens se cherchent dans ce bouillonnement où les nouvelles technologies redistribuent les cartes à tous les niveaux. Pour sa Soirée Cerfrance Entreprise 2016, organisée à l’issue de son AG, le CERFRANCE 31 a voulu faire un état des lieux des forces et faiblesses de la France face aux révolutions en cours et à venir. Pour ce faire, Bernard Ader, son Président, a convié Pascal Perri à s’exprimer sur une question qui peut sembler incongrue en ces temps de crise : « Et si demain ça allait mieux ? »
Le monde selon VUCA
S’il est célèbre pour sa participation à l’émission radiophonique « Les Grandes Gueules » sur RMC, Pascal Perri est avant tout chef d’entreprise et économiste. Il a donc attaqué son intervention sur la théorie de la « destruction créatrice » de l’économiste autrichien Schumpeter. Selon elle, l’innovation, si elle est la force motrice de la croissance économique sur le long terme, s’accompagne généralement de la destruction spectaculaire d’entreprises, même les plus importantes. Pour Pascal Perri, cette théorie de 1942 est toujours valable, à ceci près que les cycles de transformation, jusque-là espacés dans le temps (imprimerie, transport, électricité, télévision, etc.), sont considérablement raccourcis et d’une violence qu’il qualifie de « mortelle » pour les entreprises. « Virgin, qui était une multinationale avant-gardiste, a disparu corps et bien en quelques années pour avoir raté la transition internet », rappelait-il. « Le monde se décrit désormais par l’acronyme américain VUCA*, c’est-à-dire Volatile, Incertain, Complexe et Ambigu. » Il faut donc, pour les entreprises, composer avec d’incessants et complexes paradoxes (climat, économie, société, modes de vie, environnement, variation des cours et taux de change, mondialisation…). Pascal Perri a rapidement brossé quelques caractéristiques de la nouvelle donne mondiale. Tout d’abord, le monde est drogué à la dette, notamment les États-Unis et la Chine, où les entreprises comme les citoyens vivent essentiellement à crédit, avec tous les risques d’instabilité que cela sous-entend. Il analysait également la puissance digitale et économique des USA, capables de dicter leur conduite à des entreprises du monde entier, voire à des pays. « Ils font en outre preuve, comme beaucoup de puissances mondiales, d’un protectionnisme de plus en plus assumé », poursuivait-il. « Il n’y a que l’Europe qui parle toujours d’ouvrir ses frontières… Pendant ce temps, l’Amérique protège ses grandes entreprises qui deviennent tentaculaires. Je ne serais pas étonné que d’ici 20 ans, la future superpuissance ne soit pas un État, mais une entreprise comme Google. » Dans ces conditions, rester performant et efficace sur la durée représente un véritable défi pour nos entreprises.
Une France pas très en avance…
Avant de répondre à la question du CERFRANCE 31, l’économiste s’est livré à un portrait sans concessions de la France et des leviers à activer pour changer. Alors que la fiscalité est un des derniers outils des politiques, elle est, selon lui, très mal utilisée en France. La TVA est parmi les plus faibles d’Europe, mais l’impôt sur le revenu, qui est sensé être le plus républicain des impôts, n’est payé que par 45% des français, soit 600.000 foyers. « Le système est très inégal et produit des dettes », estime-t-il. « La France doit passer d’une fiscalité de rentier à une fiscalité qui soutienne la création de richesses pour sortir du rouge. » Il regrette également la peur de l’innovation dans un pays où le mot Recherche est presque devenu tabou. « OGM, nanotechnologies, etc., sont des leviers de progrès que nous devons étudier et non pas condamner d’avance », prévient-il. « Un pays qui s’interdit d’innover, donc de prendre des risques, se met en danger ! » Il critique également les maigres résultats de l’éducation, dont le budget par habitant est le plus élevé d’Europe. « 60% des chômeurs n’ont pas le BAC », rappelait-il. « Nous avons plus un problème de compétences que d’emploi. Le problème est que notre modèle d’éducation est devenu « industriel » quand il devrait être artisanal, voire faire du sur-mesure. L’éducation sera pour moi le vrai levier de croissance du 21ème siècle. » Il appelait également à développer la formation en entreprise. Dans un monde où les métiers changent presque toutes les semaines, la formation continue est un outil précieux tant pour les salariés que les sociétés, mais trop négligé en France. Pascal Perri a enfin plaidé pour une remise à plat d’un code du travail trop rigide qui, selon lui, sclérose plus qu’il ne libère l’emploi.
… mais qui a des raisons d’y croire
Devant un tel tableau, on peut se demander si la France a une quelconque chance de tirer son épingle du jeu. Pascal Perri voit plusieurs indicateurs positifs sur lesquels nous pourrions nous appuyer. Tout d’abord, la France possède un taux d’épargne très élevé. Sur les 13.000 milliards € mis de côté par les français, un tiers est sous forme de liquidités. Bien « fléché » par les Pouvoirs Publics, cet argent pourrait contribuer à soutenir l’économie. La France dispose également de ressources naturelles disponibles. L’agriculture, son vaste foncier et la technicité de ses paysans ; la mer et ses richesses, etc., sont autant d’éléments favorables à la croissance si tant est qu’on les libère. Ensuite, nous avons une démographie favorable qui va nous éviter, au contraire de beaucoup de nos voisins, un « creux » de générations. Correctement formée, cette jeunesse serait un atout pour l’avenir. Pascal Perri constate avec beaucoup de plaisir qu’une bonne part de ces jeunes se lance dans l’entreprenariat et que le nombre de startups françaises est en constante augmentation. Plus étonnant, l’économiste a pointé le fait que la France est un des pays du monde qui signe le plus d’accords d’entreprise, preuve que les grandes centrales syndicales ont compris l’enjeu de renforcer le lien social entre employeurs e1t salariés. Enfin, il se félicite que l’industrie française, que ce soit l’agroalimentaire, la chimie, l’aéronautique ou la médecine, se réoriente progressivement vers le haut de gamme. « Pendant longtemps, la France a été le pays du moyenne gamme », estime-t-il. « Or la croissance se trouve soit dans le low-cost, en jouant sur les volumes, soit dans l’excellence, avec une forte valeur ajoutée. »
Pascal Perri appelle à tout faire pour « libérer la confiance » des français. « Il est incroyable de voir à quel point la France ne s’aime plus », concluait-il. « Certes, nous sommes en période de transition d’un modèle à un autre. Mais soyons réalistes. Nous vivons dans un pays agréable, avec des garanties de bien-être qu’on ne trouve pas ailleurs. Loin du mythe de la société inégalitaire que nous nous infligeons nous-mêmes, la France est le pays qui redistribue le plus les richesses qu’elle produit. Redressons la tête, soyons heureux et fiers de nous, pour retrouver l’envie d’avancer. Quand on veut, on peut. Mais quand on peut, on doit ! »
* Volatility, Uncertainty, Complexity, Ambiguity2016 : Année du développement
Bilan satisfaisant pour l’Assemblée Générale du CERFRANCE 31, le 14 octobre dernier sur le site de Météo France de Toulouse. Avec de nouvelles prestations et des nouveaux clients, l’activité progresse de 2,5% sur l’exercice 2015-2016.
Gagner en agilité
Le chiffre d’affaires du CERFRANCE 31 augmente ainsi de 185.000 € pour atteindre les 7,7 Mons €. « La hauss
e de nos activités de conseil et la baisse de nos charges se traduisent par une hausse de 44.000 € de notre résultat », se réjouit sa directrice, Christine Huppert. « Mais nous ne devons pas relâcher nos efforts. Les cessations d’activité, pour cause de retraite et arrêt de production, ont pesé sur notre résultat. » Pour poursuivre un développement nécessaire à sa croissance et compenser pertes liées au contexte agricole, le Président du CERFRANCE 31, Bernard Ader, a présenté le projet d’entreprise aux administrateurs. Il se décline en quatre axes : Transition numérique ; Développement des compétences de conseil pour attirer davantage d’adhérents ; Diversification des activités et des implantations et enfin Mobilisation et motivation des équipes. « Nous proposons déjà des solutions 100% dématérialisées pour accompagner et sécuriser nos adhérents dans leurs démarches en ligne », déclarait-il. « Mais ce projet d’entreprise permettra au CERFRANCE 31 d’être encore plus moderne et agile, pour s’adapter aux évolutions de nos métiers et de ceux de nos adhérents. Et pour y parvenir, je compte beaucoup sur le rapprochement et la mutualisation que nous avons entamés – et que nous poursuivons – avec nos voisins de l’Ariège et du Gers. »
Des ateliers plébiscités
Depuis cinq ans, le CERFRANCE 31 regroupe, sur une demi-journée, son AG statutaire et des ateliers d’informations et d’échanges. Les 6 ateliers présentés cette année* duraient une vingtaine de minutes. Ils visent à faire bénéficier les participants de l’AG des diverses compétences, services et domaines d’action présents au sein du CERFRANCE 31. Ces mini-conférences ont rassemblé près de 250 personnes. Si ceux sur le bilan patrimonial et le statut fiscal de l’entrepreneur ont eu un beau succès, c’est l’atelier sur l’innovation agronomique qui a été particulièrement suivi. Animé par Sarah Singla, agricultrice aveyronnaise spécialiste de l’agriculture de conservation des sols, il a donné lieu à de nombreux échanges, très techniques, qui ont bousculé pas mal d’idées reçues et certainement fourni matière à réflexion à de nombreux agriculteurs. Ce qui était précisément le but de cette journée…
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