Publié le 17 décembre 2015
Jucla Viande, c’est l’histoire de plusieurs générations d’une famille de chevillards du Comminges qui a débuté ses activités en 1948. Mais Jucla Viandes, c’est aussi maintenant le parcours remarquable de Franck Jucla. En 6 ans, ce quadragénaire a fait passer le chiffre d’affaires de la modeste société familiale de 2,4 à 32 millions d’euros ! Son secret ? Un centrage de son entreprise sur la viande locale de qualité et un partenariat avec la coopérative Vivadour, avec qui il a créé une structure commune, Juviveau.
Approvisionnement sécurisé
Faire sa place dans le marché local de la viande n’est pas facile. Franck Jucla a bien compris que pour y parvenir, il lui fallait convaincre, puis fidéliser sa clientèle. Une clientèle composée majoritairement de boucheries traditionnelles et, depuis plus récemment, de moyennes et grandes surfaces. « Il y a deux impératifs », explique-t-il. « Tout d’abord, se démarquer auprès du consommateur qui est souvent perdu au milieu des différents labels et autres appellations. Ensuite, être capable de fournir en quantité, toute l’année, avec une même qualité. » Courir après les éleveurs pour obtenir le nombre de bêtes convenu ou battre la campagne pour trouver les animaux qui manquent pour honorer une commande est un « sport » que connaît tout chevillard. Une activité trop contraignante et chronophage pour Franck Jucla, qui a alors cherché un moyen de sécuriser une partie de son approvisionnement. C’est avec Vivadour qu’il trouvera la solution. « Nous nous connaissons depuis longtemps », précise Brice Lacaze, responsable de la filière bovine du groupe coopératif. « Franck Jucla est un acteur important du Sud-Ouest, qui valorise la production locale et qui est leader sur la région toulousaine. Travailler ensemble nous a donc semblé être une belle opportunité pour nous deux. Notre filière d’approvisionnement lui permet d’éviter les mauvaises surprises et lui nous ouvre davantage l’accès à la région toulousaine, où il approvisionne 70% des boucheries traditionnelles. »
Développer son identité
En parallèle de l’approvisionnement, les deux structures décident de collaborer autour de marques appartenant à Vivadour et mises à disposition exclusive de Jucla Viande. On retrouve ainsi les marques commerciales Bœuf d’Ici, Veau du Louchébem, Lou Poupet ou encore Veau d’Ici. « Il s’agit de se différencier de la marchandise standard », explique Franck Jucla. « Dans le même temps, ces marques permettent de valoriser des bêtes de qualité, nées, élevées et abattues localement, mais qui ne sont pas forcément labellisables. Les consommateurs sont très demandeurs de viande de qualité d’origine locale. Si l’on montre que la viande que nous fournissons est bonne, tout au long de l’année, ils deviennent demandeurs de nos marques, facilement mémorisables. »
Et cela marche. Aujourd’hui, Jucla Viande commercialise chaque semaine, 100 vaches, 210 veaux (dont 130 Louchebem, 20 veaux d’ici et 60 veaux fermiers sous la mère), 500 agneaux et 80 porcs. Si 65 % du chiffre d’affaires se fait dans le grand Toulouse, ses clients sont répartis entre Midi-Pyrénées et Aquitaine. Parmi eux, on compte 140 boucheries traditionnelles, 13 Carrefours Contact, 3 Carrefour Market, 2 Intermarchés et une dizaine de magasins Leclerc.
C’est avec le succès des marques dédiées au veau que l’idée de créer une structure commune autour de cette production a émergé. Juviveau Production, créée il y a 3 ans en partenariat avec la SARL Bidegain, leur apporte un surplus de sécurité dans l’approvisionnement et a ainsi permis de passer en quelques mois de 50 à 200 veaux commercialisés par semaine… « Cela marche parce que nous proposons une viande haut de gamme », insiste Franck Jucla. « Grâce à cette production de veau haut de gamme, cela m’a permis de développer mon fonds de commerce, surtout en veaux sous la mère. Je n’ai jamais acheté des veaux sous la mère aussi cher. Je peux monter jusqu’à 9,5 € pour du 0E3. Mais cela vaut le coup. L’éleveur s’y retrouve, le client est content et donc moi aussi. »
L’atout abattoir
C’est à l’abattoir municipal de St Gaudens que les employés de Jucla Viande trient les carcasses, les découpent, les stockent et les chargent dans la flotte de camions de la société. Avec une moyenne d’âge de 30 ans, la jeune équipe de 23 salariés a de l’énergie à revendre. Heureusement car le rythme de travail est soutenu. Surtout le lundi, quand il faut réapprovisionner boucheries et grandes surfaces dévalisées pendant le week-end. Mais la bonne humeur règne. « C’est, entre autres, parce que les conditions de travail sont bonnes », estime Franck Jucla. « Le directeur de l’abattoir, Éric Barnay, fait tout ce qu’il peut pour nous aider et joue vraiment le jeu. Bien sûr, on ne refuserait pas un peu plus de place pour travailler. Mais on ne va pas se plaindre. De notre côté, la société fait abattre ses animaux ici depuis toujours. C’est un outil indispensable pour préserver l’activité économique locale. L’abattoir mérite d’être aidé par les Pouvoirs Publics, qui doivent davantage investir dans cet équipement. On l’a vu, un abattoir peut disparaître presque du jour au lendemain. Si cela arrive ici, on est mal. Très mal… »
Mais Franck Jucla n’est pas du genre pessimiste. La preuve, il a encore plein de projets en tête. Le plus prêt d’aboutir est la création d’un atelier de découpe et cuisine. Prévu pour le courant 2016 dans la zone Activestre de Carbonne, cet atelier aura pour mission de mieux valoriser les sous-produits en proposant des produits tripiers (langue, daube,…) aux collectivités ou restaurants collectifs locaux.
Patiemment, une étape après l’autre, Jucla Viande poursuit son développement. Le chemin accompli depuis 1948 est déjà énorme. Mais peut-être n’est-ce encore qu’un début…