Le GNIS plaide pour le soutien à l’innovation

Publié le 21 janvier 2014

Pour la 2ème année consécutive, la direction régionale Sud-Ouest du GNIS, le Groupement National Interprofessionnel des Semences et plants, a invité la presse à son siège de Toulouse, le 16 janvier dernier, pour faire le bilan de la campagne écoulée. Une communication indispensable, selon son directeur, Gérard Crouau. « Nous avons le paradoxe d’être un poids lourd de l’économie française et d’être en même temps méconnus voire décriés », regrette-il. « Une fois pour toutes, il faut rappeler que le GNIS est une interprofession et ne représente pas uniquement les industries semencières. Nous rassemblons toute la filière, de l’agriculteur multiplicateur à l’agriculteur utilisateur, en passant par les entreprises de recherche, de sélection, de transformation et de distribution. Le tout sous la supervision de l’État, qui nous confie notamment des missions de service public dans le domaine du contrôle de qualité et de la certification des semences, par le biais d’un organisme appelé SOC (service officiel de contrôle et de certification). Chaque décision ou position que prend le GNIS tient donc compte des intérêts de chaque maillon de la filière. » C’est le bilan de tous les services que l’interprofession propose à ses membres que Gérard Crouau présentait ce matin-là.

Sud-Ouest, terre de semences

Regroupant l’Aquitaine, les Midi-Pyrénées et le Languedoc-Roussillon, la région Sud-Ouest du GNIS bénéficie de conditions météorologiques exceptionnelles. « Une vraie rente climatique ! », se félicite Gérard Crouau. « Le Sud-Ouest présente un climat relativement stable, qui autorise des récoltes précoces et des rendements réguliers, ce qui est idéal pour la production de semences. Autre avantage, même les accidents climatiques, comme on a pu en rencontrer cette année, peuvent être amortis grâce à la technicité et le professionnalisme des agriculteurs multiplicateurs de notre réseau. » Les chiffres sont d’ailleurs éloquents. En 2012/2013, les surfaces en production semencière de la région se montaient à 87.000 ha. Sur la campagne actuelle, elles ont bondi de 11.000 ha, pour représenter quasiment le tiers des surfaces nationales. Il n’est donc pas étonnant que le Sud-Ouest soit la première des 6 régions du GNIS pour la production de betteraves (67% de la production semencière nationale), de maïs et sorgho (62%) et d’oléagineux (58%). Acteur majeur, le Sud-Ouest permet en grande partie à la filière nationale semence d’être leader européen, voire mondial, en la matière.

Un secteur économique de premier ordre

« Avec 319.000 ha, soit 16% des surfaces, la France est le 1er pays producteur de semences agricoles d’Europe », rappelait ainsi Régis Boisseau, responsable technique régional et spécialiste du maïs. « Si une grosse part est constituée de semences de céréales à paille, près de la moitié de ces surfaces concerne des semences d’espèces hybrides (maïs, tournesol et colza). En très fort développement, ce sont ces dernières qui tirent la croissance de ce secteur. L’évolution des oléagineux est particulièrement importante, notamment grâce à une demande très forte des Pays de l’Est et au développement de variétés à fort potentiel. »

Les chiffres de l’emploi sont également significatifs. En croissance de 3% pour la campagne écoulée, les effectifs propres à l’activité semencière tournent autour de 9.400. Un point non négligeable en ces périodes de crise… Le secteur fait en outre travailler 72 entreprises de sélection, 249 en production, 17.800 agriculteurs multiplicateurs et 8.700 distributeurs qui alimentent 23.000 points de vente. « On y trouve tous les types d’entreprises, de la plus petite à la plus grosse », précise au passage Gérard Crouau. « Il en va de même pour les agriculteurs multiplicateurs, dont les surfaces varient de 1 à 250 ha. » C’est à l’export, enfin, qu’on mesure la puissance de la filière semencière. Avec 1.616 millions $ en valeur, la France est le premier exportateur mondial de semences agricoles (hors semences potagères), devant les Pays-Bas (1.476 Mo $) et les USA (1.394 Mo $). La filière contribue ainsi pour 17% à l’excédent commercial du secteur agricole, ce qui équivaut à la vente de 20 Airbus A320. « Soit 2 Airbus de plus que la campagne 2011/2012 », sourit Gérard Crouau. Signalons enfin que 70% des exportations sont à destination de l’Union Européenne, même si les ventes progressent de 30% pour les Pays de l’Est (surtout Russie et Ukraine) et de 20% pour le Maghreb.

Ne pas lâcher sur l’innovation

« Malgré les contraintes imposées par Écophyto en termes de lutte chimique, les rendements continuent de progresser de 0,7 à 1% chaque année », note Régis Boisseau. « Cela n’est possible que par la recherche semencière. Nous sommes condamnés à innover si nous voulons que l’agriculteur puisse compenser la baisse des intrants. » Encore faut-il que la recherche puisse travailler dans les meilleures conditions. Si la filière investit 270 millions € par an (13% du chiffre d’affaires des entreprises) dans la recherche, les évolutions réglementaires préparées par l’Union Européenne inquiètent les professionnels sur les retombées en termes d’innovation. « La filière s’est battue pour faire valoir la pertinence d’une loi sur les COV (Certificats d’Obtention Végétale) », explique Gérard Crouau. « Même si cette avancée ne semble pas avoir été comprise de tous, c’est bien une alternative au système de brevet, beaucoup plus dangereuse pour les agriculteurs, défendu par certaines multinationales. Notre crainte vient maintenant d’une dérive de Bruxelles, notamment dans ses propositions de remise à plat du cadre réglementaire sur la santé des animaux, la santé des plantes et les semences. » Pour le GNIS, harmoniser et simplifier la législation européenne est un objectif louable. Mais l’interprofession s’inquiète de certaines mesures, comme l’exemption de contrôle, de certification, voire même d’obligations minimales en termes de traçabilité, de santé et d’information du consommateur, pour des « opérateurs non professionnels » à la définition très vague. « Nous avons demandé des éclaircissements à l’Europe », poursuit Gérard Crouau. « Il y a un vrai risque de déstabiliser toute la filière, au détriment des professionnels mais aussi du consommateur. » Autre source d’inquiétude, le protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques ouvre la voie, selon le GNIS, à une marchandisation du vivant. En monnayant l’accès à ces ressources génétiques présentes dans les différents pays du monde, par des accords bilatéraux, le GNIS y voit à terme la paralysie de la recherche et de la création variétale.

« L’année 2014 promet de nombreux débats sur ces thèmes complexes », conclut Gérard Crouau. « Mais c’est aussi une de nos missions de défendre au niveau européen et mondial les intérêts d’une filière qui est une des forces vives de notre pays. Nous aurons besoin pour cela de mieux nous faire entendre et mieux nous faire comprendre du grand public. Sans un soutien politique dans ces démarches, nous aurons du mal à y arriver. »

Auteur de l’article : Sébastien Garcia