Publié le 27 novembre 2009.
C’est quelques heures après la déclaration d’intention de Bruno Le Maire de diviser par 2 le rythme de consommation du foncier, que se tenait le congrès national des SAFER, à Toulouse, le 27 novembre dernier. 550 congressistes sont venus de la France entière faire le point sur la situation du foncier en France et plancher sur le thème de l’édition 2009 : les politiques foncières en zones forestières et montagneuses.
Les SAFER ont besoin d’outils plus modernes
À l’issue de ces 2 jours de réflexion, la FNSAFER a donc interpellé les Pouvoirs Publics sur la nécessité d’étoffer les dispositifs de protection des terres agricoles pour lutter contre le morcellement des parcelles et la flambée des prix des terres. Parmi les avancées attendues : le droit de préempter pour motif environnemental ou encore la possibilité, lors de la revente d’un bien préempté, de pouvoir séparer le bâti des terres inhérentes. « Le droit de préemption est un cas extrême mais il reste un des atouts majeurs des SAFER », rappelle Michel Baylac, Président de la SAFER GHL. « Il faut que le Parlement nous donne les moyens de le faire plus efficacement. J’insiste sur le fait que nous ne sommes pas là pour empêcher les propriétaires de vendre mais pour les accompagner à le faire dans un esprit de cohérence territoriale. Je n’ai donc pas peur de dire que nous sommes les meilleurs alliés des vrais propriétaires ruraux. Ceux qui siègent au sein de nos Comités Techniques Départementaux (CTD) le savent très bien : sans l’intervention des SAFER, on se retrouverait devant des problèmes d’intransmissibilité du foncier bien plus graves qu’aujourd’hui. »
De bonnes intentions à confirmer
Preuve que le ministère de l’agriculture entend les demandes de la profession, Sabine Brun-Rageul, représentante du ministre lors des discours de clôture, a confirmé la création d’un observatoire de la consommation du foncier et la mise en place de commissions départementales spécialisées, qui avaient été annoncées lors du colloque sur le foncier agricole, organisé par la FNSEA le 25 novembre dernier. Ces commissions spécialisées seraient chargées d’émettre un avis sur les déclassements des terres agricoles, uniquement dans les communes dépourvues de documents d’urbanisme. « Bon début mais insuffisant », selon André Thévenot, Président de la FNSAFER. « Ces commissions sont, de ce fait, limitées aux territoires où les problématiques foncières se posent beaucoup moins ! Et un énième observatoire est inutile. Le constat est déjà fait et ce n’est pas un nouveau thermomètre qui fera tomber la fièvre… » Toutefois, l’annonce par Sabine Brun-Rageul de l’intention du ministère d’instaurer une taxe sur les plus-values réalisées lors des changements de destination des terres a semblé recueillir l’assentiment des congressistes. À suivre…
Trouver de nouveaux financements
Mais financer ces actions devient de plus en plus problématique. Si le ministère couvrait 70% du financement des SAFER en 1960, cette part est aujourd’hui tombée à 7%. André Thévenot a argué des similitudes entre SAFER et Établissements Publics Fonciers (EPF) pour demander le vote, par le Parlement, d’une taxe additionnelle aux 4 taxes locales. « Un seul EPF possède plus de ressources que l’ensemble des 27 SAFER de France », rappelle André Thévenot. « Avec 2 à 3 € en plus par habitant, contre près de 20 pour les EPF, la taxe additionnelle que l’on demande permettrait aux SAFER d’assurer ses missions qui relèvent souvent du service public, et dont elles s’acquittent depuis près de 50 ans. »
Ils ont dit :
William Villeneuve, Président de Jeunes Agriculteurs :
Ce qui est en jeu, c’est l’accessibilité des jeunes au foncier. Pour pouvoir le maintenir, il faut obtenir un figeage du foncier et que chaque déclassement se fasse sous contrôle de l’administration et de la profession, dans un souci de développement cohérent, pour maintenir cet outil de production qu’est la terre. C’est pour cette même raison qu’il faut refuser le photovoltaïque au sol. C’est encourager des non agriculteurs à spéculer sur du foncier pour y installer des panneaux et se faire une rente de situation.
Dominique Barrau, Secrétaire Général de la FNSEA :
Le choix du thème Montagne et Forêts traduit bien la volonté de la profession agricole de garder l’ensemble de nos territoires comme espace de production. C’est bien ce message que nous voulons faire entendre pour remporter ce véritable combat politique qu’est l’avenir de nos territoires. C’est pourquoi la FNSEA soutient sans réserve la demande de la SAFER de pouvoir distinguer le bâti des terres dans l’exercice de la préemption.
Rémi Bailhache, en charge du groupe Biodiversité à l’APCA :
Il ne faut pas oublier les « forêts linéaires » que sont les haies et qui représentent quasiment les mêmes surfaces que les forêts « massif ». Dans mon département de la Manche, nous avons 32.000 ha de forêt linéaire soit 80.000 km, 2 fois le tour de la Terre ! En matière de biodiversité, c’est un enjeu de taille. À ce titre, je suis heureux d’entendre aujourd’hui les défenseurs de l’environnement avec qui je travaille dire qu’on ne pourra pas entretenir les territoires sans les agriculteurs et les forestiers. Ils ont compris que cet entretien coûte beaucoup moins cher avec nous que sans nous. À la condition que la rentabilité de nos exploitations nous permette de poursuivre notre activité.
Jean-Louis Cazaubon, Président de la Chambre d’Agriculture des Hautes-Pyrénées :
La montagne doit être une zone d’économie agricole. Le foncier qui se ferme, qui retourne à la friche à cause de la grange pyrénéenne qui fait s’envoler le prix de l’ensemble et le met hors de portée de l’agriculteur, c’est inacceptable ! On a besoin d’un outil législatif pour ne plus se retrouver dans ces situations.
André Thévenot, Président de la FNSAFER
Une grande partie de la forêt française n’est pas gérée. Il y a un tel morcellement, avec des dessertes inexistantes ou des propriétaires qui ne savent plus où sont leurs parcelles, qu’on ne sait plus comment s’y prendre. Or il faut la rendre plus productive car la forêt est une alternative des plus intéressantes aux enjeux des énergies renouvelables. Il faut encourager la restructuration des parcellaires. Mais la SAFER ne peut le faire sans les partenaires qui concourent au développement forestier, comme le CRPF ou la Fédération de la propriété forestière. C’est pourquoi tous ont été conviés à notre congrès pour que nous puissions étudier ensemble les actions que nous pourrions mettre en œuvre.