Publié le 27 novembre 2011
À peine arrivé à la direction du Centre de Formation des Apprentis (CFA) d’Auzeville, Éric Cazassus bouscule déjà quelques habitudes. Pour sa première rentrée à ce poste, ce « pur produit d’Auzeville », comme il se définit, a voulu renforcer les liens entre l’établissement et les maîtres d’apprentissage.
Une journée pour mieux se connaître
Dans le cadre de la formation des apprentis, il y a une étape préalable obligatoire appelée « l’entretien réglementaire ». Les trois parties concernées (apprenti, maître d’apprentissage et CFA) se rencontrent afin de clarifier l’aspect réglementaire de leurs relations. Il s’agit de vérifier que la façon dont sera accueilli l’apprenti et ses conditions de travail respectent le code du travail mais également d’informer l’apprenti de ses obligations légales. Jusqu’à présent, il revenait aux coordinateurs de formation du CFA de planifier ces entretiens. Ils prenaient rendez-vous avec chacun des 270 maîtres d’apprentissage, qu’ils rencontraient soit au centre, soit au siège de l’entreprise. C’est ce côté fastidieux et un peu trop formel qu’a voulu changer Éric Cazassus. Il a donc proposé aux maîtres d’apprentissage de venir à Auzeville, le 15 novembre dernier, pour réaliser l’entretien en matinée ou début d’après-midi, et d’en profiter pour visiter l’établissement et partager un repas avec les équipes de formation. « C’est une façon plus conviviale de procéder qui a, de plus, l’avantage de faire se rencontrer les maîtres de d’apprentissage », explique le directeur du CFA. « Mais se voir dans un cadre moins conventionnel nous permet de faire passer – et recevoir – des informations que nous n’avons moins l’habitude de partager. » Et des messages, Éric Cazassus en a plusieurs à faire passer. Il voudrait par exemple instaurer une politique pédagogique ou disciplinaire plus commune avec les maîtres d’apprentissage. Une façon d’adapter l’accompagnement ou la sanction d’un apprenti, en fonction de son comportement dans l’un ou l’autre cadre de sa formation. L’autre message d’importance concerne la taxe d’apprentissage. « Le Conseil Régional est le 1er financeur de l’apprentissage, mais ses moyens se sont considérablement réduits », rappelle Éric Cazassus. « Notre seule bouffée d’oxygène reste donc la taxe d’apprentissage. Plus on sera destinataires de ces taxes d’apprentissage, plus on pourra présenter à nos apprenants des innovations techniques qui leur donneront, ainsi qu’aux entreprises qui les accueillent, un réel avantage en terme de savoir-faire. » De fait, l’équipe pédagogique ne manque pas de projets pour améliorer l’apprentissage, notamment dans la filière aménagements paysagers (92% des 300 apprentis du CFA). « La technique des toitures ou murs végétalisés est un exemple de ce que l’on pourrait apporter à nos apprenants si nous en avions les moyens », ajoute Éric Cazassus. « Dans des villes comme Toulouse, il y a un vrai marché à saisir pour les entreprises de ce secteur. Nous n’avons pas voulu cette journée pour nous plaindre de nos difficultés financières mais pour montrer aux entreprises qui accueillent nos apprentis qu’elles ont autant à gagner que nous en nous soutenant. »
L’apprentissage, la voie de l’avenir
S’il y a une chose qui fait bondir Éric Cazassus, c’est bien le préjugé que l’apprentissage est une voie de garage pour élèves en échec scolaire. « Il y a un réel travail à faire de ce côté et à tous les niveaux », s’exclame-t-il. « Que ce soit les parents, les enseignants ou l’administration, il faut absolument que les mentalités évoluent. Le diplôme obtenu – depuis le CAP jusqu’à la licence pro – est le même que celui des formations initiales. Mais il faut en plus que l’apprenti sache gérer une vie professionnelle à côté, avec les responsabilités qui en découlent. En étant un peu provocant, je dirais donc qu’il faudrait envoyer les meilleurs éléments en apprentissage. » On en est encore loin… Pourtant, les chiffres plaident largement en faveur de ce type de formation. Avec des résultats aux examens qui dépassent les 80% et un taux d’insertion professionnelle du même niveau, l’apprentissage n’a de conseil à prendre de personne. « L’apprentissage est une formation de qualité, fortement ancrée dans le monde du travail », poursuit le directeur du CFA. « Nous formons nos élèves à un savoir-faire et non à la simple obtention d’un diplôme. C’est ce qui plait aux futurs employeurs. Et le meilleur moyen de remercier les entreprises qui font l’effort d’accueillir nos apprentis, c’est quand même de leur fournir de bons professionnels. » Apprécié par celles qui le pratiquent, l’apprentissage peine toutefois à trouver suffisamment d’entreprises d’accueil. Ainsi, le CFA d’Auzeville pourrait aisément doubler le nombre d’apprentis, s’il y avait plus de maîtres volontaires. Si la filière paysagère joue bien le jeu, c’est en revanche plus difficile pour les formations agricoles et commerciales. « C’est à nous de nous battre pour renforcer les liens avec le monde professionnel », conclut Éric Cazassus. « Nous avons des projets pour y parvenir, comme la prochaine création d’une association des apprentis. Gérée par les élèves, elle servira à mettre en relation les anciens du CFA devenus chefs d’entreprise, soit avec les apprentis qui cherchent une place, soit avec les nouveaux diplômés qui cherchent du travail. »