Publié le 23 août 2011
« Si je voulais être caustique, je dirais que la Lozère est le premier département solidaire des 3 bassins versants qu’elle alimente », souriait (un peu jaune) André Mirman, son Président de Chambre d’Agriculture. « Si nous sommes aujourd’hui en situation de sécheresse, c’est que nous regardons partir l’eau de notre millier de cours d’eau vers les bassins Adour-Garonne, Rhône- Méditerranée et Loire-Bretagne, sans avoir le droit d’en prélever une goutte ! Et maintenant, nous devons faire appel à l’entraide pour que nos éleveurs puissent nourrir leurs bêtes… » À ses côtés, Yvon Parayre, Président de la Chambre d’Agriculture de Haute-Garonne, ne peut qu’abonder dans son sens : « Être appelé le « département des sources » et ne pas avoir le droit de créer la moindre retenue d’eau chez soi est simplement affligeant. Nous réclamons la création de ressources depuis longtemps, en Haute-Garonne, mais le cas de la Lozère est vraiment symptomatique du non-sens de la politique de l’eau actuelle. »
Coopération de Chambre à Chambre
Si les 2 hommes se rencontraient, ce 19 août dernier aux environs de Muret, c’est qu’une équipe de la Chambre d’Agriculture de Lozère venait mettre la touche finale à l’opération d’achat d’environ 3.000 tonnes de maïs, organisée par leurs homologues de Haute-Garonne. « C’est Jean-Louis Duquesne, ancien de la Chambre d’Agriculture de Haute-Garonne et maintenant directeur de la Chambre Régionale de Languedoc-Roussillon, qui a mis les 2 Chambres en relation », précise André Mirman. « Le but est de réaliser la transaction entre les 2 organismes puis de redistribuer le maïs aux éleveurs de Lozère. De cette façon, on est sûrs d’avoir un prix calculé au plus juste pour les 2 parties, avec un protocole clair et sans les surprises que pourraient avoir les agriculteurs dans des démarches individuelles. » Et il est vrai que les choses sont prises avec le plus grand sérieux. La délégation se rend sur une parcelle de 45 ha de Gérard Bellecourt, exploitant à Carbonne, qui fournira l’essentiel du maïs. Un premier tour de champs et un constat s’impose : les épis sont encore jeunes. « Il faudrait que le producteur fasse encore 2 tours d’eau avant de récolter », estime François Viallon, directeur adjoint et directeur de l’EDE de Lozère. Gérard Bellecourt acquiesce. L’affaire est entendue, la date de l’opération est fixée au lundi 5 septembre.
Organisation dans les moindres détails
Guy Méric et Mélanie Massebeuf , de la Chambre d’Agriculture de Haute-Garonne et de la Lozère ont eu la tâche délicate de planifier l’opération. « Les lozériens voulait faire récolter par des entrepreneurs de chez eux », racontent-ils à titre d’exemple. « On a préféré faire appel à des gens d’ici, pour plus de réactivité et bénéficier de leurs connaissances de la région. D’autant plus que les 2 entrepreneurs que nous avons sollicités ont de suite répondu présent et sont prêts à faire ce qu’il faut pour faciliter les choses et aider ainsi les éleveurs de Lozère. » Sébastien Pagès, de la SARL « la Montespanaise » et la SARL Gajan, transporteur, présents ce matin-là, semblaient avoir déjà bien les choses en main : « On est venu voir la topographie des lieux », précise Sébastien Pagès. « Vu qu’il y aura plusieurs transporteurs pour emmener le maïs, on a intérêt à être prêts pour éviter les bouchons au chargement et de retarder les chauffeurs. » Ce n’est d’ailleurs pas par hasard que cette parcelle a été retenue. Plusieurs producteurs avaient donné leur accord pour l’opération mais Guy Méric a opté pour Gérard Bellecourt pour la simple (mais très pratique) raison qu’un ancien silo borde sa parcelle. L’exploitant rassure André Mirman : le silo sera nettoyé de tout gravât et mauvaise herbe pour la récolte. « Les collègues de Lozère ont déjà assez souffert de la sécheresse », confie Gérard Bellecourt. « La moindre des choses est qu’on leur envoie un ensilage propre et de la meilleure qualité possible. Il faut faire les choses bien ou on ne les fait pas. »
Sur ce, il rejoint François Viallon et Mélanie Massebeuf, pour achever les formalités administratives de l’achat et du transport. Numéros et emplacement des parcelles, actes de cession, demande d’exonération des frais de péages autoroutiers, coordonnées de toutes les parties en présence, …, ce n’est pas la paperasserie qui manque. « C’est fastidieux », concède Yvon Parayre, « mais c’est la seule façon d’éviter les déconvenues qu’ont pu avoir des éleveurs ou des céréaliers dans des transactions individuelles. L’entraide entre nos 2 départements n’est pas tant au niveau du prix de vente, même si l’exploitant a été plus que raisonnable sur ce point, mais surtout du point de vue logistique et sécurisation de l’opération. »
Une fois les papiers en ordre, une poignée de main chaleureuse entre les présents et la délégation de Lozère part voir un autre maïsiculteur, à quelques kilomètres de là. Dans leur coin, téléphones portables vissés à l’oreille, les 2 entrepreneurs saluent de loin. Ils sont déjà en contact avec les homologues pour planifier le chantier. Solidaires mais toujours pro…