Gestion des Ray-grass en colza, quelle conduite à tenir en octobre ?

A. Micheneau – Terres Inovia

Très concurrentiel du colza à l’automne vis-à-vis de l’azote, le ray-grass est au rendez-vous de cette nouvelle campagne. Alors que les applications de prélevée représentent un intérêt stratégique dans la gestion du ray-grass, les impasses et/ou décalages en post levée précoces n’ont pas toujours permis un contrôle précoce de l’adventice. Face aux résistances vis-à-vis des antigraminées foliaires, et les conditions encore trop chaudes pour la propyzamide, pourquoi ne pas mobiliser le levier le plus efficace à ce stade : le binage ? 

75% des parcelles du Sud-ouest pourraient être binées puisque semées au semoir monograine.

La prélevée au cœur du jeu

Terres Inovia conseille de maintenir une intervention herbicide en prélevée pour permettre un contrôle précoce du ray-grass. Pourtant, cette intervention n’est pas systématiquement réalisée dans des situations à risque. Outre les impasses en prélevée, un trop grand nombre de parcelles voient l’application reportée en post levée précoce. Ce décalage, certes sécurisant (vis-à-vis du risque de mauvaise levée du colza et des difficultés de remplacement après une intervention à base de chloroacétamides), s’avère néanmoins bien moins efficace sur ray-grass qu’en prélevée stricte. Les premières levées de ray-grass sont concomitantes à celles du colza. Par conséquent, une application après les premières levées de ray-grass rend l’effet antigerminatif inopérant sur ces premières levées. 

Sur 10 essais réalisés par Terres Inovia, il est mis en évidence une perte d’efficacité moyenne de 15 points pour une application de post-levée précoce, par rapport à une prélevée comme le montre la figure 1. 

Les fenêtre de semis 2024, plutôt sécurisantes pour les levées grâce aux pluies régulières auraient dû favoriser les interventions de prélevée, même à bas coût. Ceci aurait permis d’éviter les nombreuses situations problématiques que nous rencontrons aujourd’hui vis-à-vis de l’adventice.

Point sur les solutions de post levée : Entre résistance et conditions d’application

La résistance désormais fréquente, voire généralisée aux molécules inhibitrices de l’ACCase (familles dites des « fop » et « dime »), rend les antigraminées foliaires bien souvent inefficaces. 

La propyzamide présente par exemple dans le Kerb, ou le Ielo (associé à l’aminopyralide), représente le dernier levier chimique efficace sur des ray-grass levés. Cette molécule à action racinaire présente une rémanence intéressante dont dépend l’essentiel de son efficacité. Or, cette rémanence n’est permise qu’en conditions froides et humides. Appliquée trop tôt sur des sols encore bien réchauffés, la molécule se dégrade et s’avère d’une efficacité insuffisante. Par conséquent, son utilisation ne sera recommandée qu’à partir du mois de novembre. Les causes d’échec sont souvent dues à des conditions d’application non respectées.

La voie du mécanique, un levier efficace !

Au regard des éléments concernant les herbicides, le contrôle des populations de ray-grass en octobre ne peut par conséquent s’envisager que par la voie mécanique, et en particulier par le binage. Une pratique tout à fait envisageable dans plus des 75% des parcelles de colza du sud-ouest puisque l’on y retrouve des écartements larges généralement de 60 cm (Enquêtes Terres Inovia 2022). Sur graminées, l’efficacité moyenne est mesurée à 56% dans nos essais, avec nécessairement une disparité entre l’inter rang et le rang. Une efficacité qui n’a rien à envier aux références herbicides de prélevée, plus encore lorsqu’elles sont dépositionnées en post-levée précoce. On estime en effet, une efficacité autour de 80% sur l’inter-rang pour des graminées encore peu développées, à 2-3 feuilles. Au-delà, l’efficacité décroit mais peut tout de même permettre de contrôler une partie des ray-grass. Sur le rang, l’efficacité restera inférieure à 20% (on peut retrouver cette légère efficacité grâce à un effet butage et/ou équipements type doigts kress).  

Par ailleurs, vis-à-vis des dicotylédones, dans le contexte du sud-ouest où les pressions sont souvent modérées à faibles, le binage pourrait dans bien des situations permettre une impasse herbicide sur dicotylédones. 

Les conditions humides du mois d’octobre peuvent favoriser le risque de repiquage et ainsi réduire l’efficacité. Toutefois, dans des situations où le ray-grass concurrence fortement le colza, un binage apportera un réel renfort au colza, en réduisant drastiquement la concurrence du ray-grass. Même si le ray-grass repart, cette action favorisera celle de la propyzamide lorsque les conditions idéales d’application seront réunies, généralement pas avant le 10 novembre.

 Votre contact régional :

Quentin Lambert (q.lambert@terresinovia.fr) – Ouest Occitanie

Auteur de l’article : Rédaction Tup 31